L’affaire ‘‘Faux diplômes’’ à la Douane continue ses dégâts| avec des agents brisés et une justice à double vitesse
Treize mois après l’éclatement du scandale des faux diplômes dans l’administration douanière ivoirienne, l’affaire révèle un traitement inégal et une gestion décriée par les victimes. Deux agents sont morts, d’autres vivent un calvaire fait de suspensions arbitraires, d’humiliations publiques et de détresse sociale, pendant que certains, pourtant fautifs selon la Fonction publique, échappent à toute sanction. Une affaire d’État qui interroge sur l’équité, la légalité et l’humanité dans la lutte contre la fraude.

Tout débute avec le concours professionnel exceptionnel de 2021, destiné aux agents comptant entre 11 et 23 ans d’ancienneté, conformément aux dispositions de l’article 77 du Statut général de la Fonction publique. Après les épreuves, la formation et le stage réglementaire, les résultats définitifs ont été entérinés par arrêtés ministériels.
Pourtant, le 4 mars 2024, lors d’une cérémonie à l’École nationale des Douanes, plusieurs agents sont soudainement accusés de fraude par le Directeur des Ressources Humaines, Mea Koffi Ignace, en présence des colonels Bouagba Brice et Serre Germain. Leurs noms et matricules sont aussitôt exposés publiquement sur les réseaux sociaux, en totale violation de leur droit à la dignité humaine.
Pire encore, ces agents sont traduits en justice, et leurs primes– acquises bien avant cette affaire – sont brutalement suspendues. Depuis, ils vivent dans une profonde précarité, marqués par une détresse psychosociale constante.

Parmi les victimes de cette humiliation publique et des sanctions administratives du Directeur Général des Douanes : Coulibaly Awa Anastasie, hospitalisée après un choc psychologique, est transférée du privé au CHU de Treichville faute de moyens, avant d’y décéder.
L’agent Kouamé Konan Jean Claude, quant à lui, souffrant d’un syndrome dépressif, meurt dans son village après une détérioration de son état de santé, sans prise en charge. Tous deux victimes collatérales d’une procédure disciplinaire conduite sans humanité ni rigueur.
Le 18 octobre 2024, dans un retournement inattendu, le ministère de la Fonction publique annonce avoir annulé l’admission de certains inspecteurs et administrateurs après enquête. Pourtant, ces derniers avaient déjà été promus et affectés avec leurs nouveaux grades par la Direction générale des Douanes.
Contrairement aux premiers agents exposés et traînés devant la justice, ces derniers ont été discrètement retirés de leurs fonctions, mis à la disposition de la DRH… sans suspension de salaire, de primes, ni poursuite. Ce deux poids, deux mesures alimentent les accusations de favoritisme et de partialité à l’encontre du DG Da Pierre.
Autre faille juridique majeure

Les suspensions prononcées contre les agents actuellement en procès s’appuient sur une délégation de signature émise en 2018, bien avant la nomination du ministre actuel en 2023.
Or, cette délégation est juridiquement personnelle et non transmissible. Sa validité est donc sérieusement remise en cause. Enfin, les agents suspendus dénoncent la coupure brutale de leurs avantages financiers, sans notification formelle.
Les correspondances de leur avocat, pourtant nombreuses, sont restées lettre morte. Malgré la gravité des conséquences humaines, la hiérarchie douanière n’a jamais reconnu ses torts.

Aujourd’hui, une question cruciale se pose : combien de vies encore faudra-t-il briser avant que justice, équité et responsabilité prévalent dans ce dossier ?
La lutte contre la fraude ne saurait justifier des méthodes qui violent les droits fondamentaux et compromettent l’intégrité de l’administration publique.
Ledebativoirien.net
H.KARA
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