DANANÉ-Côte d’Ivoire : DANS L’UNIVERS INGRAT ET INQUIÉTANT DES FILLES DE JOIE ; SANS ESPOIR ?

DANANÉ PROSTITUÉES  La décennie  de crise qu’a traversée la Côte d’Ivoire notre a engendré son cortège de maux qui minent la société ivoirienne en général et en particulier, celle de Danané. Parmi ces effets collatéraux figure la prostitution qui a pris une vitesse de croisière sur le quotidien des Dananois.   Une visite nocturne dans quelques coins chauds de la cité aux ronces ! La prostitution menace!

Danané, distante de 65 kms de Man et a plus de 650 kms d’Abidjan regorge de nombreux maquis, bars, restaurants, night clubs et biens d’autres lieux fréquentés par les jeunes filles dont l’âge oscille entre 18 et 25 ans qui s’adonnent de plus en plus à la prostitution.

arton32741Le Samedi 14 mai dernier nous arrivons à Danané à 16 heures 7min. Un jeune chauffeur A.T. de taxi-moto nous interpelle. « Messieurs, y a taxi-moto où allez-vous? ».  « Nous cherchons un toit ». Il poursuit :«Vous cherchez hôtel quo ! ». Nous lui répondons par l’affirmative. Il nous remorque et nous conduit dans un coin de la place. Chemin faisant, A.T. engage une conversation avec nous. «D’où venez-vous? », demande-t-il. Nous lui expliquons que ce n’est pas important. Ce qui est urgent, c’est de connaître l’ambiance qui règne ici la nuit.

 Il poursuit : «Si vous avez besoin de mon service, je peux vous aider ». Ce que nous acceptons.  Aux environs de  21 heures 30 minutes, nous appelons notre guide pour parcourir la ville. Très bavard, il nous conduit au quartier ‘‘cailloux’’, bouillonnant de monde. Là, nous trouvons des jeunes filles avec leur accoutrement extravagant qui ne laisse personne indifférent. Nous entrons dans un des bars, ‘‘la première classe’’. Quelques-unes d’entre elles  nous rejoignent aussitôt à notre table sans que nous claquions les doigts.

 Une conversation s’engage:

prostitution menace«Vous êtes très belles les filles». Elles ne mettent du temps à orienter la causerie vers ce qu’elles estiment le plus important, cette nuit pour elles. L’une d’entre elles nous propose sa ‘‘marchandise’’ au prix de 1000 FCFA la passe et 10.000 FCFA la nuit avec elle. Tout en nous soulignant au passage que la vie est devenue est très dure à Danané.  Nous  promettons de revenir les voir en lassant quelques bouteilles de bières sur la table, qu’elles acceptent volontiers.

 Nous faisons notre entrée dans le bar juste à côté. Là, elles sont nombreuses. Notre guide nous informe que c’est comme ça ici. Elles attendent d’éventuels clients. Habillées des derniers remparts de leur nudité, elles sont visibles. Nous invitons trois d’entre elles à notre table. Au cours des échanges, A.G, âgée de 25 ans nous clarifie qu’elle fait ‘‘son travail’’, depuis la survenance de la longue crise de 2002-2012, qu’a connue le pays alors qu’elle était en classe de 2nd dans un établissement privée à Guiglo. Elle a donc décidé de venir chez son oncle à Danané afin de poursuivre ses études. Malheureusement, la misère était à ses portes.

 Sa voisine de table

 arton32741«J’étais en classe de 4ème  à Bin-Houyé en 2005 quand la crise a éclaté. J’ai trouvé utile de venir chez ma Tante ici pour me trouver les moyens afin de poursuivre mes études. Hélas, les moyens ont manqué. Je me suis retrouvée chez une amie qui travaillait dans un maquis. C’est elle qui m’a hébergée enfin de compte. C’est comme ça que tout a commencé», relate K.P 26 ans.

Contrairement à T.L, âgée de 21 ans coiffeuse exerce dit-elle son métier pour s’occuper de son fils âge de 5 ans dont elle ignore la situation géographique actuelle de son père, car disparu après sa forfaiture. Puis, elle s’occupe de ses parents restés au village. «Je suis obligée parce que je suis l’aînée de ma famille. Je dois me battre pour gagner ma vie», justifie-t-elle.

 La prostitution semble être la porte de la fin de  la misère pour beaucoup de jeunes filles, car elle  a pris un grand pas à Danané car la cité regorge de nombreux lieux très fréquentés par ces jeunes filles. Un constat !  Certaines filles pensent pourvoir à leurs besoins grâce à leur charme comme elles le disent : ‘‘C’est notre café-cacao’’.

DANANÉ PROSTITUÉES  Nous nous rendons à la gare de Man et à Houphouët-Ville en compagnie de notre guide vers 00 heure. Là tout bouge. Mlle Chantal que nous rencontrons dans le bar ‘‘chocó’’ nous fait savoir qu’elle taxe les clients selon la tête car, il y a des fonctionnaires de la mise d’or d’Ity qui viennent quasiment chaque  jour.

 Dans ce bar l’alcool coule à flot. Bernard G., une vielle connaissance, nous dit que cette situation s’est accentuée depuis la crise de 2002 et la post crise électorale. Selon lui, le marché d’emploi se fait rare. Il n’y a pas d’entreprise après La TANRY  et ASRECO. Les informations recueillies indiquent que la crise a vraiment secoué Danané. Pour Kampeu, il n’y a ‘‘pas d’activité ici’. Nos sœurs des pays frontaliers ont augmenté le nombre sans cesse de celles-ci. Nous comprenons que la base de cette pratique honteuse, c’est la misère et aussi la recherche du gain facile par le charme ».

DANANÉ PROSTITUÉES   A la grande gare où se trouve le bar ‘‘ facebook’’ et bien d’autres, il est 2 heures du matin. Là elles font les 100 pas dans l’espoir d’avoir d’éventuels clients pour passer une nuit de fée. Dans le cas contraire, les numéros sont laissés dans les hôtels en cas d’urgence !

 La prostitution est un phénomène mondial mais le cas de Danané, est plus qu’inquiétant, car présente dans presque tous les quartiers de la ville. Le cas particulier des quartiers Houphouët-ville et caillou est un exemple de ce fleuron regrettable dans la cité aux ronces.

MISTER DAN             

Correspondant ledebativoirien

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