Présidentielle 2016 Gabon-Ping et Ali se souviennent de la Côte d’Ivoire 2010?

3000 morts selon, ces chiffres de la  communauté internationale continuent de hanter le quotidien des Ivoiriens, Six ans  après la présidentielle de  2010. Les Ivoiriens peinent  à sortir des blocs dans lesquels les ont confinés les résultats contestés de ladite  présidentielle. le secours des africains et du reste du monde  n’y peuvent  pour l’heure rien eu égard  à la fracture visible au sein de  la population. Mais cette situation ne sert pas encore de guide aux prétendants au fauteuil présidentiel au Gabon.

jean pingIls ont certainement la nostalgie de la Côte d’Ivoire. Dès dimanche 28 août  après-midi, à Libreville, Jean Ping, principal opposant à la réélection d’Ali Bongo, s’est déjà dit «élu», devant la presse, se basant sur des chiffres collectés par l’opposition.  De son côté Ali Bongo, président-candidat,  indique qu’il attend «sereinement» les résultats.

La déclaration de Ping intervient alors que la centralisation des chiffres n’est pas encore terminée et que les résultats officiels ne seront communiqués que mardi à 17h, a fait savoir le ministère de l’Intérieur.

C’est à son quartier général, à Libreville, que Jean Ping a parlé aux journalistes : « Je suis l’élu », a-t-il déclaré, précisant qu’avant d’être président, il y a une « procédure ». « Au moment où je m’exprime devant vous, les tendances générales nous donnent vainqueurs », a-t-il ajouté lors de cette courte conférence de presse, à l’intérieur de son QG. Il a remercié ceux qui avaient porté leurs suffrages en faveur de l’alternance et du changement, et a parlé d’une « victoire annoncée ».

Jean Ping se base en fait sur les chiffres de l’opposition. Depuis le début des dépouillements en effet, ses militants, ayant accès aux procès-verbaux, compilent les résultats. Chaque représentant de l’opposition obtient une copie des procès-verbaux et ces documents sont rassemblés dans vingt postes de saisie, connectés à un système central, via un réseau satellite, et cela afin de transmettre les chiffres au quartier général (QG) de Libreville.

Gabon Ping et BongoComme vous le savez, ce jour est historique pour notre pays. En dépit des nombreuses irrégularités, enregistrées ici et là, vous avez su déjouer les pièges de la fraude congénitale de ce régime que nous accompagnons enfin dignement vers la sortie […] Je serai le président de toutes les Gabonaises et de tous les Gabonais. Dans quelques heures, dans quelques jours, nous serons enfin libres », Jean Ping, candidat de l’opposition à l’élection présidentielle.

Déjà ce matin, son camp avait annoncé une avance « claire et évidente », après avoir recueilli les chiffres d’environ la moitié des bureaux. Jean Ping a cité notamment, dans sa réunion avec la presse, le cas de la province de l’Estuaire, l’une des neuf provinces du pays, où il aurait gagné dans tous les bureaux de vote. L’opposant parle également d’un raz-de-marée dans le nord du pays.

Ensuite, il a accusé le pouvoir d’un coup de force parce que le porte-parole d’Ali Bongo samedi a annoncé qu’il était en mesure de dire que le chef de l’Etat serait réélu. Jean Ping a dit qu’il ne voyait pas comment Ali Bongo pourrait se déclarer vainqueur. Jean Gaspard Ntoutoume Ayi, le responsable de la communication, s’est interrogé sur le fait que le ministère ne dise pas un mot sur le camp Bongo. Il a dénoncé un deux poids deux mesures, ajoutant avoir l’impression que certains responsables ne font plus la différence entre leur fonction et leur participation à la campagne présidentielle. Et il a conclu que si Jean Ping avait violé le droit, qu’on saisisse la justice.

alibongoAli Bongo: « Nous attendons sereinement les résultats »

Jean Ping estime qu’un quadrillage de la ville serait prévu, il a parlé au conditionnel, et que certains craignent un coup de force justement du pouvoir. En tout cas, il a ajouté que ses militants pouvaient maintenant célébrer la victoire, et que les résultats compilés par l’opposition étaient « crédibles », puisque l’opposition a accès aux procès-verbaux. Il a demandé au président Bongo de se montrer « fair-play », d’accepter les résultats.

Après cette brève conférence de presse, Jean Ping est sorti devant une foule de plusieurs centaines de partisans qui ont entonné l’hymne national pour célébrer leur victoire.

Quelques heures plus tard, Ali Bongo a à son tour réagi devant ses partisans

Mes chers compatriotes, je suis seulement venu vous dire combien j’étais heureux d’avoir pu échanger avec vous au cours de cette campagne. Merci pour le soutien que vous m’avez apporté. Nous avons fait une très belle campagne. Pour l’heure, mes chers compatriotes, nous sommes légalistes et nous sommes républicains donc nous attendons sereinement que la Cénap (commission électorale, ndlr) annonce les résultats de l’élection.

Ali Bongo, président sortant

Le porte-parole d’Ali Bongo, Alain-Claude Billie By Nze, avait parlé dans la matinée d’une tendance inverse, avec de l’avance pour le président. Il a ajouté que rien ne pourra inverser cette courbe. Il ne donne pas de chiffres, disant vouloir attendre l’annonce officielle de la Commission électorale. Les tendances, dit-il, seraient négatives pour Ali Bongo dans les provinces du Moyen-Ogooué, le Woleu-Ntem et l’Ogooué Maritime, dont est originaire Jean Ping et où se trouve Port-Gentil, la capitale économique. Alain-Claude Billie By Nzea parlé de scores serrés dans la province stratégique de l’Estuaire, qui comprend Libreville. Par contre, il a annoncé que le président arrivait en tête dans les cinq autres provinces, et que sur l’ensemble du pays, il possédait une avance « qui ne pouvait plus être inversée».

ali bongoAlain-Claude Billie By Nze accuse, en tout cas, l’opposition de jouer un jeu dangereux, de manipuler les résultats et de préparer la contestation électorale. Il a ainsi accusé Jean Ping d’avoir tenté, par des moyens détournés et illégaux, de s’autoproclamer vainqueur d’une « élection qu’il sait avoir perdue».

De même, le ministère de l’Intérieur a accusé Jean Ping de rompre avec le respect des institutions et de la loi en se déclarant élu alors même que le dépouillement est en cours. Le ministère parle d’une regrettable tentative d’exercer une pression sur le corps électoral et les institutions chargées de centraliser les votes. Pacôme Moubelet-Boubeya, le ministre de l’Intérieur, dénonce une tentative de « manipulation du processus démocratique », ajoutant que toute ingérence de ce type ne serait pas tolérée.

On s’attendait à cela. De part et d’autres, vous avez des radicaux, donc personne ne veut lâcher du lest. Ce n’est pas une surprise, il fallait s’y attendre. Et les Librevillois, que pensent-ils de cette guerre de communication ?

Résultats officiels mardi

Gabon Ping et BongoQuoi qu’il en soit, la centralisation des chiffres est toujours en cours, et seule la Commission électorale est habilitée à annoncer les résultats finaux. Enfin, le ministère de l’Intérieur, qui doit proclamer les résultats officiels, a envoyé un communiqué indiquant que ce sera chose faite ce mardi à 17h (locales).

Une source de ce même ministère appelle par ailleurs à la prudence, ajoutant que la diffusion de statistiques intermédiaires pourrait semer «le trouble et le doute».

En attendant, la capitale Libreville ou Port-Gentil, la deuxième ville du pays, étaient beaucoup moins animées que d’habitude. De nombreux commerçants ont préféré fermer boutique, il y avait peu de circulation. Les habitants sont nettement moins sereins. George, un homme habitant derrière l’Assemblée, a déclaré à notre envoyé spécial que les gens avaient peur de ce qui pouvait se passer maintenant. Ils craignent de nouvelles violences, comme lors de la dernière élection présidentielle en 2009.

Avec  RFI?

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