Immigration clandestine :Pourquoi les jeunes africains investissent-ils tant dans la mort ?

Nombreuses sont les conséquences désastreuses de l’immigration clandestines de jeunes africains qui échouent dans le fond de la méditerranée ou dans le désert libyen. Une situation qui a conduit à  la tenue des assisses,  WEST AFRICAN YOUNG LEADERS SUMMIT,  à Lomé du 6 au 9 septembre dernier autour du thème : «les jeunes à la mer, quelles alternatives de solutions ? ».

jeunee-a-lamer‘‘Ledebativoirien.net’’ propose, ici, l’analyse et les propositions de cette jeunesse ambitieuse venue pour la plupart des pays de la CEDEAO et qui pense que entrepreneuriat est une alternative durable de solution face à ce phénomène, à côtés d’autres mesures spécifiques.

Analyse

Article 12 : «Aucun Ivoirien ne peut être contraint à l’exil. Toute personne persécutée en raison de ses convictions politiques, religieuses, philosophiques, ou de son appartenance ethnique peut bénéficier du droit d’asile sur le territoire de la République de Côte d’Ivoire, sous la condition de se conformer aux lois de la République».

Cet article de la constitution d’Aout 2000 est sans doute une référence ivoirienne mais rentre dans le cadre de la déclaration universelle des droits de l’homme du 10 décembre 1948, déclaration qui autorise la migration légale et impose le devoir de protéger aux Etats, pour les individus qui souffrent le martyr. Pourquoi donc, en dépit des dispositions légales autorisant le déplacement des personnes à travers le monde, des jeunes africains s’adonnent ils à des déplacements « macabres » ?

jeuness-ouestL’Afrique, berceau de l’humanité, et continent dont le monde économique dit beaucoup de bien pour les années à venir, demeurent frappée au quotidien par la perte de ses enfants aux larges des côtes africaines. Les raisons sont diverses, mais nous tâcherons d’en aborder quelques-unes au plan politique, économique, et social. Nous essaierons de faire un tour dans les instruments juridiques avant d’aborder les conséquences de cette migration et la réponse des jeunes leaders africains réunis à l’occasion d’un sommet à Lomé.

Cause du déplacement massif

L’une des raisons essentielles du déplacement massif des populations en Afrique demeure la mal gouvernance. En effet, une élection sur deux sous nos tropiques est tachetée de sang, de fraude, de violations graves des droits de l’homme, atteintes aux biens et à l’intégrité physique des personnes.

ivoiriens rapatriésLe seul cas de la Côte d’Ivoire, fait état de plus de 3000 morts à la suite des élections présidentielles de 2010-2011. On compte de million de personnes déplacées internes, sans omettre tous ces vaillants enfants du pays qui ont dû quitter le pays pour raison d’insécurité. Et comme si cela n’avait pas servi de leçon, nous avons malheureusement constaté des émeutes au Burkina Faso, en Centrafrique, récemment au Gabon dont on n’a pas encore fini de compter les victimes.

Les jeunes, premières victimes des politiques choisies par les gouvernants de leurs pays, sont au centre de toutes ces manifestations de mécontentement et qui finisse par porté atteinte à leurs droits les plus légitimes et les plus importants dont le droit à la vie.  Au Nigéria, et dans sa périphérie (Cameroun, Tchad, Niger, Frontière Mali-Algérie etc), ce sont des attaques djihadistes de BOKO HARAM et de ses alliés, qui ne cessent de tuer, kidnapper, réduire en esclavage et prendre en otage des populations qui souffrent énormément déjà.

mur-immigrationCes attaques ont engendrés plus de 30 000 personnes victimes d’actes de terrorisme en 2015. Peut-on espérer un avenir personnel et professionnel dans de telles conditions ?

Aussi, est-il pertinent d’aborder la question des conditions économiques de nos Etats africains. Le slogan du siècle et qui a certainement marqué les esprits en Afrique est la vague des Etats dont la vision est d’atteindre l’Emergence soit en 2020, 2030 voire 2050.

Les gouvernements africains ont donc fait le choix de politique macro-économique basée sur la construction d’infrastructures (routes, bâtiments, ponts etc.) Les croissances économiques ont fortement progressées ces dernières années et certains Etats envisagent même atteindre des taux de deux chiffres avant 2020.

Toutefois, c’est assez paradoxal de voir que malgré ces progressions, c’est la misère, le taux élevé du chômage, l’accroissement du banditisme juvénile (cyber criminalité, constitution de gangs, agression en bande organisée etc.), au sein de la population. La population grogne et parfois se lâchent pour certain en disant : « On ne mange pas route, On ne mange pas pont».

 C’est au minimum 15 million de jeunes africains qui accèdent au marché de l’emploi chaque année en Afrique, alors que le continent ne produit pas autant d’emploi. Est-ce un cadre idéal pour la réalisation personnelle ?

Politique migratoire Européenne « Eldorado de la mort »

jeunee-a-lamerEnfin, une dernière raison assez évocatrice est certainement le renforcement ou le durcissement des mesures d’entrée sur les territoires européens. La politique de l’immigration choisie de la plus part des Etats européens, réduit considérablement les chances des jeunes sans emplois et sans qualification ni expérience, d’accéder aisément à l’octroi de visa et autres documents administratifs légaux autorisant leur installation en terres européennes.  Face à tous ces facteurs, nombre de ces jeunes africains ont décidé de choisir d’investir dans « l’eldorado ou la mort»

Ce sont 22 000 migrants qui sont morts dans la mer, aux larges des côtes africaines en partance pour leur rêve d’atteindre l’Europe.  D’après certaines informations recueillies, le voyage coûte à chaque migrant la bagatelle somme d’un million  de franc CFA au moins (1 000 000 FCFA).

ivoirien rapatriésSi on fait un calcul simple on se retrouve à 22 000 000 000 FCFA pour ces 22 000 migrants, investis dans leur projet de voyage. Objectif atteint, 22 milliard de FCFA pour 22 000 morts, un objectif atteint à 100%. Cela démontre que cette somme échappe au contrôle de nos Etats. Cela démontre encore que les jeunes ont une préférence et une attirance incroyable aux aventures tragiques. C’est aussi une fin de non-recevoir ou de non attirance aux politiques et projets de gouvernances des chefs d’Etats africains en exercice.

Mieux, c’est un refus à la vie, oui une vie de difficultés, une vie de chômage, une vie de désespoir. Des jeunes africains font des économies, des parents y donnent toutes leurs économies, pour ce rêve qui meure presque toujours dans la mer.

Que Faire pour arrêter l’ « hécatombe » ?

Ce sont ces nombreuses conséquences désastreuses qui ont conduit à la tenue du WEST AFRICAN YOUNG LEADERS SUMMIT, tenue à Lomé du 06 au 09 septembre autour du thème : « les jeunes à la mer, quelles alternatives de solutions ? »

jeunessCes jeunes, venus pour la plus part des pays de la CEDEAO, pensent que l’entreprenariat est une alternative durable de solution face à ce phénomène, à côtés d’autres mesures spécifiques.

Ainsi, ils recommandent :

  • La révision des curricula des systèmes éducatifs des Etats afin d’intégrer les programmes de formation professionnelle et technique
  • Faciliter l’accès aux micro-crédits pour les start-ups des jeunes et instituer des systèmes d’accompagnement des jeunes entrepreneurs et porteurs de projets d’entreprises
  • Les renforcements de capacité des acteurs non étatiques (société civile, secteur privé…) pour augmenter leur capacité de création d’emploi et d’absorption de la main d’œuvre
  • Développer des programmes d’information et de sensibilisation sur les enjeux de la migration illégale en mettant l’accent sur les populations rurales
  • Faciliter les formalités d’accès et de circulation dans les pays qui font l’objet d’immigration
  • Légiférer dans le domaine de la répression des passeurs en mettant l’accent sur la coopération dans le renseignement
  • Faire le plaidoyer pour une harmonisation des législations sur le Droit maritime et la coopération inter africaine et internationale (dans les domaines de la sécurité maritime, de la piraterie, de la structuration de la pêche illégale…)
  • Plaider pour une appropriation par les Etats africains des activités et investissements portuaires

immigration-jeunee-a-la-merVulgariser et encourager la création d’entreprises dans l’économie bleue (gestion des déchets des activités portuaires) et des filières techniques dans le maritime.

Pourvu que les gouvernement des pays africains réussissent  à mettre en oeuvre ces recommandations de leurs jeunesses.

Grace Ozhylly

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