Abidjan-littérature: Le roman de l’année  ‘‘La grève des serveuses’’ vivre les autres dimensions

    Comme toute œuvre romanesque, ‘’La Grève des Serveuses’’ peut être décortiquée sous plusieurs autres angles :

Le volet social (le dialogue de sourd)

Selon le dictionnaire Universel Francophone, édition Edicef, 1996, page 544, la grève peut être définie comme la cessation concertée de tout travail  pour la défense d’intérêts communs a un groupe professionnel ou des salariés…Si pour les grévistes de la trempe des serveuses, la grève s’avère fondée, ce n’est pas toujours le cas pour la partie adverse (comme celle de M. Gbroukpo).  Celle-ci refuse parfois d’écouter les grévistes pour mettre fin à la crise, parce que simplement les patrons l’image de M. Gbroukpo du patronat des maquis pensent que les grévistes sont manipulés. Vrai ou faux ? Ce qui est sûr, pendant ce temps c’est la population qui souffre.la greve des serveuses 1

Le volet sécuritaire et économique.

Le blocus ou le blocage dû à la grève affectent directement la sécurité et l’économie à l’instar du 31 décembre paralysé par les serveuses. Les gens disent souvent que la route précède le développement. Mais nous disons que la sécurité précède l’économie et le développement.

Le volet politique, show-biz et medias

En Afrique, tout est politisé et du syndicalisme à la politique il n’y a qu’un pas. Pendant qu’une corporation et ses responsables sont à couteaux tirés comme les serveuses et leur patronat, les politiques se frottent les mains et s’invitent dans le débat ou le récupère. Le parti au pouvoir et ses alliés font mains et pieds pour étouffer la grève ou décapiter les frondeurs. L’opposition de son coté comme un soutien implicite aux grévistes, dénonce et condamne avec la dernière énergie ce qu’elle appelle ‘’l’arbitraire du pouvoir’’. Tout comme les politiques, les professionnels du show-biz et des medias se livrent une bataille sans merci selon qu’on soit proche de l’opposition ou du pouvoir à travers leurs chansons, leurs discours et leurs écrits. Les politiques, les artistes et les journalistes aiment toujours faire la ‘’une’’ des journaux.

Mais dans ce tohu-bohu, les grévistes doivent comprendre qu’ils sont seuls face à leur destin. Le dénouement heureux ou malheureux de la crise ne dépend que de leur unité, leur résistance, leur mobilisation, de leur vision et de la foi en ce qu’ils font. C’est ce que Denise Aïsha et Eliane ont compris en tant que leaders des serveuses.

la greve des serveuses gnmbryLe volet culturel

Les maquis, les bars, les night et autres espaces de loisir sont des espaces d’expression artistiques. Raser ces endroits sans autres forme de procès comme dans ‘’La Grève des Serveuses’’ revient à museler les artistes et d’une façon ‘’tuer’’ le tourisme. Or un pays ou les artistes surtout engagés et les éveilleurs de conscience ne peuvent s’exprimer est loin d’être démocratique. Il faut donc créer des espaces d’expression artistiques comme le Président Djessan Doukou la préconisé dans ‘’La Grève des Serveuses’’. N’ayons pas une peur bleu des artistes et des éveilleurs de conscience. Laissons- les  nous ouvrir les yeux et l’esprit. Créons les conditions pour qu’ils puissent nous prévenir des dangers du futur et nous égayer. La culture, c’est tout ce qui nous reste quand nous avons tout perdu.

Le volet spirituel

Tout est spirituel avant d’être physique. La victoire ou la défaite, la victoire ou la défaite, tout cela est d’abord spirituel et dépend de notre foi et nos prières. Mais avant tout, notre  âme et notre esprit doivent dominés notre environnement grâce à notre volonté et notre force interne et mentale. Et c’est face aux épreuves que le volet spirituel apparaît important et inévitable. Certes Denise Eliane et Aïsha, guides des serveuses n’étaient pas des férues de la religion mais leur état d’esprit, leur détermination, leur foi a fait la différence face à leur bourreau M. Gbroukpo qui avait pourtant tous les moyens pour écraser les serveuses.

L’argent et le pouvoir

Riche homme d’affaire, puissant, président du patronat des maquis, ami, conseillé et bras droit du président de la République, on aurait dit que l’argent et le pouvoir  avaient pratiquement rendu M. Gbroukpo fou. Rien ne lui résistait sur son chemin. Mais il avait oublié que l’argent et le pouvoir n’ont pas d’impact sur l’esprit qu’était devenu Denise, incorruptible et insaisissable malgré toutes les propositions alléchantes.

la greve des serveuses gnmbryL’éducation

Pour être franc, l’éducation a foutu le camp depuis belle lurette. De l’autorité parentale aux collèges et lycées en passant par les universités, tout est à-vaut- l’eau. L’autorité étatique est bafouée. Mais au fond à qui la faute, quand ceux qui sont censés respecter et protéger les lois, les violent et les transcendent sans remord ? En fait, à vrai dire les jeunes n’ont plus de modèles à suivre. Partout c’est l’alcool, le sexe, la drogue, l’achat de conscience… on sert à la jeunesse tout sauf ce qui est utile à l’image de la perversion qui sévit dans ‘’la grève des serveuses’’.

La Violence

La conséquence directe des échecs des négociations pour mettre fin à la crise conduit à la violence. Oui la violence. Elle est partout. Comme une société en mutation, nos villages, villes et communes, nos collèges, nos lycées et universités, sans oublier les parties politiques, sont en proie à la violence… tant verbale que physique. Mais il y a un adage de chez nous qui dit que, quand l’ongle et la chaire se disputent, le sang va forcément couler. Et le conflit qui oppose les serveuses à M. Gbroukpo est édifiant. Le résultat de ces guéguerres et de ces positions tranchées ne peut qu’être brimades, menaces, bastonnades, emprisonnements, tortures, arrestations, intimidations… destruction de biens matériels….affrontement… enlèvement… blessés…morts…

Conclusion

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l’é’crivain cinéaste,journaliste Léopold Gnabry

Nous disons qu’on peut éviter tous ces gâchis et tous ces martyrs à travers le dialogue. Mais un dialogue franc, ouvert, sans préalable et inclusif. Vaut mieux s’asseoir et discuter maintenant pour épargner des vies humaines. Dans tous les cas les protagonistes finiront par discuter après les belligérances. Mais de grâce que chacun mette un peu d’eau dans son vin.

Les guéguerres interminables, les positions tranchées ne sont que les prémices d’une instabilité aux dérives imprévisibles. Tant qu’il n’y aura pas de sécurité, de paix et de stabilité, l’économie sera en berne ou évoluera en dents de scie. Et nous pensons humblement que le concept de l’émergence et de l’Ivoirien nouveau devraient inclure cette réalité dans leur programme.

De l’auteur

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