Abidjan-Lapatride avec Christiane Djahue en librairie

Vous venez de faire paraître dans les librairies Lapatride. Dans le titre du recueil, il y a une faute d’orthographe qui frappe, est ce que cela est fait à dessein ?

chritiane djahue(Rires…) Il n’y a pas de faute. Cela a été fait à dessein parce que quand Lapatride (le personnage) débarque à Washington, quartier précaire de la commune de Cocody, il se présente comme l’apatride qu’il était aux populations de Washington dont la majorité est issue du lumpenprolétariat, vous en connaissez les caractéristiques. Les populations se sont donc imaginé que son prénom était Lapatride qui s’écrit bien évidemment en un seul mot.

On reste dans le même contexte. Lapatride est un personnage violent dans le recueil de nouvelles. Comment un caïd de sa trempe pouvait-il succomber au charme d’une jeune fille au point de lui confier tous ses biens avant sa mort ?

Mettons cela sur le compte de l’amour. C’est d’ailleurs mentionné dans le recueil. Lapatride a mené une existence vide de sens jusqu’a ce que sa route croise celle de Fanta dont il tombe profondément amoureux. Bien que cet amour ne soit pas réciproque, Lapatride décide d’être reconnaissant à la jeune fille en lui offrant l’opportunité de sortir de sa condition d’extrême pauvreté. La question posée dans ce sens, donne l’impression que Lapatride a fait preuve d’injustice vis-à-vis de la population de Washington en venant en aide à Fanta. Ce n’est pas du tout le cas dans la mesure où chaque fois qu’il commettait des actes de vandalisme notamment des cambriolages, il redistribuait l’essentiel de son butin aux plus pauvres. Il est une sorte de Robin des Bois.

couverture du recueil Nouvelle 1C’est parce qu’il est apatride que la vie n’a pas de sens pour lui ? De temps à autre, il voulait se donner la mort. Ici vous posez la problématique de l’existentialisme?

Non pas vraiment ! C’est une nouvelle qui part d’une histoire vraie. Dans les années 2000, j’ai connu un couple de français qui avait des difficultés à scolariser l’enfant qu’il venait d’adopter. Mais après, on s’est perdu de vue. Par la suite j’ai imaginé ce que pouvait être l’existence de cet enfant une fois devenu grand… Voilà ! Et puis l’apatridie a des conséquences dramatiques sur la personne apatride. L’apatridie engendre des problèmes de discrimination et d’accès à l’éducation, à l’emploi,  au logement et aux soins de santé.

C’est vrai que le recueil est une fiction mais de là, à la réalité il y a un pas. Dans ‘‘le Parvenu’’, ‘‘Fin d’un héro’’, ‘‘Le Général Habib’’ qu’il y a un certain rapprochement avec la réalité qu’a vécue la Côte d’Ivoire depuis 2011…Il y a des faits similaires qui coïncident…

Oui, je reconnais avoir été inspirée par l’histoire récente de la Côte d’Ivoire. Il y a des similitudes avec la Côte d‘Ivoire, mais aussi avec bon nombre de pays africains, d’autant plus que les chefs d’Etats africains ont en partage les mêmes tares. Notamment les violations des droits de l’homme, la dictature, l’animalisation de l’homme, les pillages des ressources économiques. Et les peuples ont les mêmes griefs contre leurs dirigeants pour la simple raison  qu’ils vivent les mêmes difficultés, les mêmes misères. Ils sont sujets aux mêmes désenchantements, aux mêmes désillusions etc…C’est d’ailleurs pour cela que d’une Afrique à une autre, on observe très souvent des phénomènes tels que les coups d’Etat, les guerres, les rebellions…

Le programme de gouvernement du Général Habib que vous énoncé dans votre œuvre semble vous séduire… ?

C’est l’un des programmes de gouvernement dont je rêve pour la Côte d’ Ivoire mais aussi pour l’Afrique toute entière. Cependant, le problème ne se situe pas au niveau de la conception du programme mais plutôt de sa mise en application. Je reste convaincue que le programme de gouvernement du général Habib qui m’a séduite n’est pas meilleur que celui de nombre de nos dirigeants. La différence réside dans le  fait que ces personnalités, une fois à la magistrature suprême, n’ont plus le soucis des leurs.

chritiane djahue ecrivaine ledebativoirien.netDans ce recueil vous avez fait un clin d’œil à l’amour. Et vous dénoncez les infidélités dans le couple. Pour vous c’est quoi l’amour idéal?

Je n’avais pas vu les choses sous cet angle. Bon en réalité l’amour ne fait pas partir des thématiques principales de ce recueil de nouvelles. Pour moi, tout comme la haine, l’amour idéal relève du domaine privé. Souffrez que je ne vous en dise pas davantage.

Beaucoup de noms propres à consonance ‘’baoulé’’ interviennent dans le roman. Que vous voulez-vous que l’on retienne?

Cela n’est nullement lié à mes origines, parce que je suis bété (ethnie de l’ouest de la Cote d’Ivoire). Je viens de Gagnoa. J’aime tout simplement l’Histoire du peuple baoulé. C’est peut-être la raison pour laquelle  on retrouve de nombreux prénoms baoulé dans le recueil.

lapatride christiane djahue ledebativoirien.netLa Esméralda qui est nom déjà connu dans le genre romanesque apparait ici avec une attribution particulière. Elle n’est pas Gitane comme dans le roman de Victor Hugo ‘‘Notre Dame de Paris’’. Mais elle ramène à une femme Adioukrou (ethnie du Sud de la Côte d’Ivoire). Quelle est la similitude entre ces deux personnages ?

Mon Esméralda à moi a certes les attributs extérieurs d’une gitane, mais elle ne l’est pas. Ici, elle se rêve plutôt descendante d’esclave. Et son vrai nom est ‘’Esmel Géraldine’’.  Oui elle est Adioukrou.

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