Clause NPF, APEi: ce qui guette la Côte d’Ivoire et le  Ghana

Je viens d’identifier un argument qui pourrait faire réfléchir la Côte d’Ivoire et le Ghana qui ont à la fois mis en application leurs APEi et viennent aussi de signer (du moins de parapher) la ZLEC (Zone de libre-échange continentale) le 21 mars à Kigali. Il s’agit de la clause NPF (de la Nation la Plus Favorisée) de leurs APEi les obligeant à étendre à l’UE les avantages tarifaires consentis dans la ZLEC et, sur ce point les conditions de la Clause sont plus faciles à appliquer pour la Côte d’Ivoire et de Ghana que pour l’APE d’AO.

  ouattara Il y a trois différences très importantes dans les conditions de cette clause entre l’APE d’AO et les APEi de CI et du Ghana.

– Selon l’article 16 de l’APE d’AO « La Partie Afrique de l’Ouest accordera à la Partie Union européenne tout traitement tarifaire plus favorable qu’elle accordera après la signature du présent Accord à un partenaire

commercial autre que les pays d’Afrique et les Etats ACP, ayant, à la fois, une part des échanges commerciaux mondiaux supérieure à 1.5 pour cent et un taux d’industrialisation mesuré par le ratio de valeur ajoutée manufacturière rapportée au PIB supérieur à 10 pour cent, dans l’année précédant l’entrée en vigueur de l’accord préférentiel visé dans ce paragraphe. Si l’accord préférentiel est signé avec un groupe de pays agissant individuellement, collectivement ou à travers un accord de libre-échange, le seuil relatif à la part des échanges commerciaux mondiaux considérée s’élèvera à 2 pour cent ».

– Mais l’article 17 de l’APEi de CI comme de l’APEi du Ghana n’exclut pas les pays d’Afrique et Etats ACP, réduit la part des échanges mondiaux réalisée par le pays partenaire et ne mentionne pas un taux d’industrialisation minimal pour ce partenaire : «  »accord de libre-échange » signifie tout pays développé, ou tout pays ayant une part des échanges commerciaux mondiaux supérieure à 1 pourcent dans l’année précédant l’entrée en vigueur de l’accord de libre-échange mentionné au paragraphe 2, ou tout groupe de pays agissant individuellement, collectivement ou à travers un accord de libre-échange ayant une part des échanges commerciaux mondiaux supérieure à 1,5 pourcent dans l’année précédant l’entrée en vigueur de l’accord d’intégration économique mentionné au paragraphe 2″.

téléchargementMaintenant que la Côte d’Ivoire et le Ghana, à côté de 11 autres Etats de l’AO, ont signé le 21 mars 2018 la ZLEC (Zone de Libre Echange Continentale, avec le sigle anglais AfCFTA), lors du Sommet extraordinaire des Chefs d’Etat de l’Union Africaine à Kigali, ils se sont engagés à ouvrir leurs marchés à 90% de leurs importations venant de l’Afrique, même s’il faut encore attendre que le schéma de libéralisation de la ZLEC soit mieux précisé, notamment avec le dépôt de l’offre tarifaire de chaque Etat précisant les 10% non libéralisés, et après ratification de la ZLEC par 22 Etats pour qu’il soit ratifié, ce qui devrait nécessiter au moins deux ans.

Comme il est dit que le pourcentage des échanges commerciaux mondiaux réalisé par le partenaire sera basé sur les données de l’OMC, celle-ci montre que l’Afrique a représenté en 2016 2,2% des exportations mondiales et 3,2% des importations mondiales. Il en résulte que la Côte d’Ivoire et le Ghana devront aussi libéraliser 90% de leurs importations venant de l’UE, donc bien au-delà des 75% prévus dans leurs APEi.

COTE D4IVOIRE ET GAHNAD’autant que l’article 17 des APEi comme l’article 16 de l’APE d’AO n’exigent pas que « le traitement tarifaire plus favorable » corresponde à des importations effectives. Cela impliquerait des pertes de recettes douanières très supérieures à celles déjà considérables calculées pour les APEi de Côte d’Ivoire et le Ghana.

En ayant fortement aidé le processus de la ZLECaprès avoir imposé les APEi, l’UE gagnera sur les deux tableaux tandis que la Côte d’Ivoire et le Ghana seront les dindons de la farce ! A suivre…

Jacques B

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