Cote d’ivoire-3è mandat : le Forum de la société civile de l’Afrique de l’Ouest invite Alassane  Ouattara à y renoncer

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DÉCLARATION DU FOSCAO-CI SUR LE PROCESSUS ÉLECTORAL EN COTE D’IVOIRE

ETATS DES LIEUX

Notre pays, la Côte d’Ivoire est un maillon essentiel du développement économique et de la stabilité de la région Ouest africaine, compte tenu de sa population et des investissements réalisés aussi bien par ses ressortissants que par les partenaires étrangers. Au-delà du développement économique, l’absence de conflit ouvert depuis la fin crise postélectorale de 2011, a suscité  beaucoup d’espoir au sein de la population pour la construction d’un Etat de droit, le renforcement de la démocratie et la réconciliation, pour un développement harmonieux et durable.

election au burkina asoEn cette fin d’année 2019, notre pays, la Côte d’Ivoire s’achemine, allègrement, vers l’organisation de l’élection présidentielle de 2020. Cette prochaine élection ravive les souvenirs de la radicalisation des positions politiques, en 2010, qui se sont soldés par des violences importantes, ayant entraîné la mort de plus de 3000 personnes selon un bilan des Nations Unies. Après son investiture officielle par le Conseil Constitutionnel, le 21 mai 2011, le Président élu,  SEM. Alassane Ouattara, a engagé le pays dans un double processus de normalisation progressive de la situation  sécuritaire et politique du pays, d’une part, et de réconciliation nationale, d’autre part.

Mais, force est de reconnaître que près de dix ans après, d’immenses défis se présentent à la nation toute entière. Il s’agit entre autres de la consolidation de l’indépendance du système judiciaire vis-à-vis de l’exécutif , de la liberté d’expression et d’association, du respect des droits de l’homme , de la réconciliation nationale et de la libre participation des partis politiques à  la mise en place d’un organe transparent et inclusif qui sera en charge de l’organisation des prochaines élections.  En effet, le plus grand défi pour notre pays est de favoriser une alternance pacifique à la tête de l’Etat, à la suite de l’organisation, en octobre 2020, d’une élection présidentielle transparente, inclusive, démocratique et équitable qui consoliderait davantage la paix fragile et l’Etat de droit.

Notre position

VOTE LISTE ELECTRALE CEILe déroulement de l’ensemble des processus électoraux, depuis 2010-2011, a mis à nu la fragilité de la situation, résultant d’une appropriation insuffisante, par les Ivoiriens, de la démocratie dans notre pays. Il a également mis en exergue la récurrence de la violence sur la scène politique ivoirienne, comme en témoigne le fait que les élections législatives et locales de 2011, 2013, 2016 et 2018 ont été marquées par des menaces, violences, et de multiples contestations des résultats. Ils ont enfin mis en évidence la confiance limitée, voire insuffisante dans la Commission électorale indépendante (CEI), accusée à tort ou à raison, de partialité dans l’organisation ou la proclamation des résultats.

Semblant tirer les conséquences de ce qui précède, et suite à l’arrêt de la Cour africaine des droits de l’homme et des peuples (CADHP), le gouvernement a entrepris des discussions avec les partis politiques et la société civile entre janvier et août 2019, dans l’optique de la mise en place d’une CEI qui devrait respecter, dans sa composition et dans la durée de son mandat, les principes d’impartialité, de neutralité et de compétence, conformément aux instruments régionaux et internationaux.

Il faut, en effet, rappeler que le protocole de la Communauté Economique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) sur la démocratie et la bonne gouvernance, en son article 3, précise que les organes chargés des élections doivent être indépendants et/ou neutres et avoir la confiance des acteurs et protagonistes de la vie politique. Malheureusement, au terme du processus de discussion entre le gouvernement, les partis politiques et la société civile, une bonne partie des parties prenantes continue de réclamer une CEI plus consensuelle, plus équilibrée et autonome financièrement vis-à-vis du gouvernement.

En plus, le manque de lisibilité sur la réforme constitutionnelle annoncée par le chef de l’Etat, SEM Alassane Ouattara, à l’occasion de son adresse à la nation le 06 août 2019, et le doute que le président Ouattara continue d’entretenir sur sa volonté de briguer un troisième mandat contribue à faire monter la tension dans le pays, faisant craindre aux populations la répétition des violences post-électorales de 201O-2011. Un sentiment de crainte des populations alimenté par la résurgence de la violence verbale au sein de la classe politique, et de nombreuses décisions des autorités visant à restreindre l’espace public, comme les interdictions de sortie du pays pour des personnalités de l’opposition, les arrestations et les procès de leaders d’opinion jugés peu conformes à la loi etc. 

Nos recommandations

bureaux de voteNous, Forum de la société civile de l’Afrique de l’Ouest, section Côte d’Ivoire  (FOSCAO CI), préoccupé par la situation sociopolitique qui se radicalise de plus en plus à travers les discours à un an de l’élection présidentielle de 2020 :

  • Félicitons la communauté internationale notamment les Nations Unies, l’Union Européenne, l’Union africaine, la CEDEAO et les partenaires bilatéraux tels que la France, les Etats unis, le Canada et la Grande Bretagne et l’Allemagne, pour leur soutien constant à la Côte d’Ivoire depuis plusieurs décennies
  • Demandons une reprise du dialogue politique en impliquant tous les acteurs politiques et la société civile afin que la Commission électorale indépendante nationale et ses démembrements régionaux soient les plus transparents et inclusifs possibles
  • L’adoption d’un code de bonne conduite des partis politiques qui contiendra un engagement de tous les acteurs politiques à accepter les résultats des élections ou de les contester par des voies exclusivement légales conformément à l’article 17 de la charte africaine de la démocratie, de la gouvernance et des élections
  • Appelons les partis politiques à modérer leur langage, en mettant l’accent sur leur programme et la sensibilisation de leurs militants
  • A la communauté internationale et particulièrement à la France

Utiliser son influence considérable sur le gouvernement du Président Alassane Ouattara, pour que ce dernier renonce publiquement, et définitivement, à un troisième mandat conformément à la Constitution qui prescrit clairement que nul ne peut faire plus de deux mandats. Ce qui permettrait de mettre un terme à l’inquiétude grandissante des populations ivoiriennes qui craignent de plus en plus la réédition de la violente crise adopostélectorale de 2010-2011

  • Au gouvernement

Rendre public, dans les plus brefs délais, le contenu de la réforme constitutionnelle annoncée par le président de la République, afin de mettre fin à toutes les supputations, laissant penser à une volonté du pouvoir d’écarter de la course à la présidentielle ses adversaires les plus sérieux.

  • A la Société civile 

Faire un suivi-évaluation rigoureux du processus politique et électoral en vue de contribuer, par ses observations et critiques, à la mise en place de mécanismes efficaces pour l’organisation d’élections transparentes, inclusives, démocratiques et équitables en 2020. 

  • Aux partenaires au développement

gbazto
Guillaume Gbato

Soutenir les initiatives de la société civile ivoirienne, en mettant l’accent sur la construction d’un mouvement citoyen impartial, capable de se déployer sur toute l’étendue du territoire national, pour accompagner toutes les étapes du processus électoral.

Fait à Abidjan, le 20 Décembre 2019

Pour le FOSCAO Côte d’Ivoire

Le Coordonnateur par intérim

  1. Guillaume GBATO

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