Urgent-CPI: la fin de la conspiration et prières païennes autour d’un procès bouclé (le dossier d’Aujourd’hui) 

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La Cour Pénale Internationale va sans doute se rallumer une dernière fois dans l’affaire Gbagbo et Blé Goudé. Les 22 et 24 juin prochains, elle prévoit en effet deux audiences qui vont décider du sort de l’appel formulé par Fatou Bensouda à l’issue de la décision d’acquittement prononcée par les juges de la chambre de première instance en janvier 2019. La procureure gambienne, sur le départ après un mandat catastrophique, y joue son va-tout mais sa situation est désespérée.

cpi   On va revoir Laurent Gbagbo et Charles Blé Goudé à une nouvelle audience de la Cour Pénale Internationale mais on va également revoir Fatou Bensouda qui est l’actrice principale de ce raout intervenu dans une certaine confusion mais légal puisque la Gambienne avait le droit de faire appel de l’acquittement des deux hommes. Et c’est bien ce qu’elle a fait, montrant qu’elle était prête à tout pour les maintenir derrière les grilles de la prison de Scheveningen.

Et on peut dire que cela lui a même souri d’une certaine façon pendant une semaine d’abord puis pendant un an, ou presque, lorsque les deux acquittés, chose jamais vue dans les annales de la justice, ont vu la preuve de leur innocence être assortie d’une liberté conditionnelle.

Finalement, en mai, la chambre d’appel remettait les compteurs à zéro, les deux acquittés pouvant à nouveau aller où bon leur semble, avec le devoir de rappliquer pendant les audiences que nécessiteront la procédure d’appel. Nous y voilà donc et les arguments de Fatou Bneouda vont maintenant être scrutés de fond en comble et disséqués.

Prières païennes autour d’un procès bouclé

cpi aujourdhuiCar la situation de la Gambienne est mal engagée. Pendant toutes ces années de procès, elle n’a en effet pas réussi à mettre en doute l’innocence de ses accusés. Bien au contraire, c’est plutôt d’elle que le monde entier a fini par douter, les anti-Gbagbo qui ne voulaient pas s’avouer vaincus s’en prenant à sa manière de travailler tandis que les supporters de celui-ci se mourraient de rire chaque fois que ses propres témoins mettaient en difficulté son bureau. Vint ensuite le réquisitoire on ne peut plus sévère des deux des trois juges qui ont qualifié d’exceptionnellement faibles les éléments de preuves qu’elle a brandis devant la chambre de première instance.

La cour en sortait d’ailleurs d’autant plus gênée qu’elle avait donné le temps nécessaire à la procureure de chercher les preuves pouvant confondre les deux hommes. Pour ce faire, deux des trois juges avaient foulé aux pieds le sacro-saint principe du doute en droit bénéficiant à l’accusé mais également ignoré les mises en garde de la juge belge Christine Van den Wyngaert qui écrivait, dans son opinion dissidente en novembre 2014, que les preuves fournies par la procureure contre Laurent Gbagbo ne respectent pas les standards habituels en matière de preuve même si ceux-ci ont d’ordinaire été bas.

Cinq années plus tard, c’est à sa conclusion qu’a fini par se rallier la chambre de première instance qui ne laissait pas le soin à la défense de présenter ses témoins et décidait, au terme de son verdict majoritaire, d’acquitter les deux hommes.

La honte en vue ?

gbagbo 2Alors Fatou Bensouda peut-elle s’en sortir ? A la vérité, elle n’a aucune chance. Elle le sait tellement que, pour minorer la charge du jugement porté contre son travail, la Gambienne plaide pour que la Cour juge que la chambre de première instance s’est trompée et qu’elle n’a pas bien analysé ses preuves. Une telle décision aurait alors deux conséquences. D’un, Laurent Gbagbo et Charles Blé Goudé seraient toujours libres parce qu’ils ont été acquittés mais, de deux, la procureure ou un autre procureur pourrait reprendre l’affaire et poursuivre à nouveau les deux hommes. Tel est donc l’enjeu des deux audiences qui auront lieu les 22 et 24 juin prochains à la Cour Pénale Internationale.

La procureure Fatou Bensouda veut, pour ainsi dire, avoir un droit de harcèlement sur les deux hommes contre lesquels elle pourrait alors, dans un tel cas de figure, reprendre ses enquêtes et rechercher les preuves pouvant faire mouche. De bout en bout, elle aurait alors eu trois chances supplémentaires de coincer l’ancien président ivoirien et son ministre de la Jeunesse. Et si l’on peut, d’emblée, imaginer que la Gambienne ne veut pas s’avouer vaincue parce que c’est aussi son honneur qui est en jeu, sa qualité de procureur avec, on peut pas non plus évacuer le fait qu’elle poursuive un but politique.

Bensouda, Gbagbo CPI aujourd'hui fin conspiration LEDEBATIVOIRIEN.NETCar mettre les deux hommes en prison ou faire peser sur leur tête une épée de Damoclès juridique, ce serait avant tout les empêcher d’avoir une vie politique active, ce qui ferait plutôt plaisir à Alassane Ouattara qui a eu de nombreux tête-à-tête avec la procureure de la CPI entre 2011 et 2011. A cela, il faut ajouter que les principales «preuves» présentées par le bureau du procureur ont été celles directement fournies par le régime d’Alassane Ouattara. De sorte qu’au moment où les lampions s’apprêtent à s’éteindre sur ce long procès qui aura plus terni l’image de la CPI qu’il n’aura fait avancer la cause de la justice, on a aussi le sentiment d’assister à la fin d’une conspiration entre la Côte d’Ivoire et la procureure Fatou Bensouda.

SEVERINE BLE (AUJOURD’HUI)

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