Maître en Histoire Contemporaine et journaliste chevronné, Hervé GOBOU est un écrivain émérite. En 2010, il obtient le Prix Frat Mat Éditions de Nouvelles sur le Cinquantenaire de la Côte d’Ivoire avec l’ouvrage collectif »50 ans d’indépendance de la République de Côte d’Ivoire en 14 nouvelles ». En 2016, il est consacré Prix Côte d’Ivoire 2016 de la Journée du Manuscrit Francophone avec l’ouvrage »Drame au paradis » (Les Éditions du net, 2016,100p).
En tant que Journaliste, il a également été lauréat, en 2019, du Prix du Reporter LAFARGE HOLCIM pour la Construction Durable, décerné par la multinationale Lafarge Holcim. Hervé GOBOU est du reste co-auteur de »Zokou GBEULY, un héros de la résistance en Côte d’Ivoire » (L’Harmattan, 2020, 198p), une œuvre collective sous la direction du Pr Séry Bailly dont il fut un proche collaborateur. Il a à son actif trois opuscules : »Séry Bailly, l’Immortel érudit » (2018), »Tapé Oré Félix, Tohourou de Digbapea, le mystérieux héritier de Srolou Gabriel »(2020) et »Jean-Baptiste Zibodi, le Rossignol du Babadou. Marie-Josée Forever » (2021).
Hervé GOBOU revient sur la scène littéraire avec « Séhia Luckson PADAUD, une vie de musique. Le Gbêkazoukou de Tahiraguhé »(juillet 2022), un Essai de 296 pages préfacé par le Pr Dédy Séri.
Qu’est-ce qui justifie la publication d’un ouvrage sur l’artiste musicien Luckson PADAUD ?
La publication de l’ouvrage sur Luckson Padaud répond à la volonté d’immortalisation d’un héros de la musique ivoirienne, voire africaine qu’est Séhia Luckson PADAUD. Il fait partie des artistes ivoiriens qui ont grandement marqué l’histoire de la musique authentique à laquelle il a ajouté une touche originale et moderne. En 1982, date de la sortie de son premier album intitulé »Kalgbeu », il trônait déjà dans le Top 6 de la musique ivoirienne, juste après des monuments tels que Lougah François, Aïcha Koné, Jimmy Hyacinthe, Ernesto Djédjé et Bailly Spinto…Par ailleurs, Luckson Padaud, outre son impact culturel et sociétal, a fait montre d’une certaine longévité artistique (40 ans de musique) qui mérite d’être analysée par les critiques que nous sommes. Plusieurs autres raisons dont la profondeur des textes de ses chansons sont également des motifs objectifs d’écriture de cet ouvrage.
Justement, de quoi parle Luckson Padaud dans ses chansons ?
Luckson Padaud aborde plusieurs problématiques dans ses chansons : l’amour, la fraternité, le rassemblement, la cohésion sociale, la paix…Il dénonce aussi la haine, la jalousie, la médisance, la méchanceté, la sorcellerie…Il évoque le patriotisme, le panafricanisme, invite à la préservation du patrimoine culturel africain. Ses chansons sont un véritable véhicule de la culture bhété. Dans la chanson »Kalgbeu », il demande à ses devanciers dont Amédé Pierre et Ernesto Djédjé, de lui ouvrir les portes de la scène musicale afin qu’il exerce son art.
C’est une chanson à la fois magnifique à entendre et d’une grande portée prémonitoire. Dans »Laba Laba », il invite la communauté au rassemblement et à la réjouissance autour de son concept musical le LABA LABA, dans un contexte de concurrence fratricide, dans les années 90, notamment avec l’autre dinosaure de la musique tradi-moderne bhété, feu Gnaoré Djimi…Sa musique nous renseigne sur l’histoire, la géographie, la sociologie du peuple bhété et de la Côte d’Ivoire en général.
Que retenir de sa guéguerre musicale avec feu Gnaoré Djimi ?
Ce fut un moment où la concurrence avec les deux artistes était à son paroxysme. En réalité, la concurrence musicale, avec les polémiques et attaques verbales que se font les artistes en pays bhété, n’est pas une mauvaise chose en soi.C’est un stimulant qui permet la créativité artistique. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle la chanson se traduit par le terme »lou » ( »loulouè », querelles). Cependant, celle qui s’est produite entre ces deux artistes avait atteint un niveau inquiétant…
L’avènement de Gnaoré Djimi fut un coup dur sur un épisode de la carrière de Padaud. Mais celui-ci a fait preuve d’une grande résilience. Il s’est notamment replié sur le village et d’y revenir avec un concept majeur: le Laba Laba. Ce qui lui a permis de remonter la pente…
Pourquoi le « Gbêkazoukou de Tahiraguhé »?
Le »Gbêkazoukou », c’est la chenille processionnaire ou poilue. Le corps de ce insecte est fait de sorte qu’il est difficile de le saisir. En fait, c’est un élément d’identification chez Padaud qui, dans la chanson éponyme, se présente telle une chenille de ce type. C’est une façon pour lui d’exprimer son invincibilité dans un univers artistique très souvent mystiquement dangereux.
Que retenir de la vie culturelle de Luckson Padaud…
L’intérêt de l’histoire de Luckson Padaud se situe à plusieurs niveaux dont la capacité de résilience et la force de rester soi, en dépit d’un environnement agressif et évolutif. Tout ne fut pas rose dans sa vie. Il a fallu faire montre d’un certain dépassement de soi pour traverser les périodes difficiles et connaître cette carrière exemplaire. C’est une grande leçon de vie. Il est resté soi en demeurant encré dans la tradition car, dit-il dans l’ouvrage, »j’ai été envoyé par les ancêtres pour garder le temple »…
Luckson Padaud, c’est une grande conscience professionnelle, un travail acharné, une organisation structurelle avec un orchestre (Les Frères SÉHIA), un studio d’enregistrement (Studio Ernesto Djédjé), une fondation ( Fondation Luckson Padaud), une structure de production (Luckson Padaud Production ou LPP)…Tout ceci fait de lui un artiste exceptionnel dont la nouvelle génération doit s’inspirer.
ledebativoirien.net
par Jean L.
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