Côte d’Ivoire-cette paix sociale doit servir que les riches ? Refus du silence à petites doses (2)

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Dans cette belle ignition a-t-on étouffé les désaccords et éloigné les ressentiments ?

L’actualité récente en dit plus et long Jusque-là, qu’est-ce qui a bien bougé et bien changé pour les travailleurs ivoiriens, agents de l’Etat et fonctionnaires dans ce caléidoscope ?

La stratégie est simple, organiser des ateliers, des séminaires, et endormir un peu les meneurs et, hop ! On passe à autre chose laissant les revendications en l’état.

Avec l’épée de poursuites pénales contre les grévistes dans le secteur public, qui se rendront coupables de voie de fait avec privation de salaire.

La FESACI, la PLATEFORME, l’INTERSYNDICALE regroupant une cinquantaine de syndicats de fonctionnaires, de l’UNATRCI, HUMANISME, la COSYFOP, La Confédération des syndicats libres de Côte d’Ivoire Dignité (Cisl Dignité et l’UGTCI en savent beaucoup sur les labyrinthes da la hiérarchie de leurs ministères respectifs en tentant de poser leurs préoccupations.

Mais plusieurs d’entre eux brandissent toujours le refus de reddition des syndicats face au silence que veut le gouvernement ivoirien. Une des réformes contre laquelle se battent les différents syndicats demeure celle qui fait passer l’âge de la retraite de 55 à 60 ans, voire 65 ans pour les grades les plus élevés. Les cotisations augmentent de 6 à 8,33% du salaire, alors que les pensions ont été réduites de 30 à 50% selon les catégories.

En termes de revendications nouvelles comme anciennes, la Fédération des syndicats de de Côte d’Ivoire continue en 2024 d’exiger des gouvernants, de meilleures conditions de travails avec en prime, le paiement des salaires des syndicalistes illégalement aux mains du ministère notamment celui de l’Education nationale.

Les responsables syndicaux sont traqués par les hommes de Mariatou Koné comme du gibier. Les syndicats sont décapités. Ne dites pas que c’est une entrave à la liberté syndicale.

A cette heure l’affaire de la rétention salariale des mois de janvier et de février 2020 de 300 syndicalistes enseignants pour 3 jours de grève demeure, toujours malgré les Etats généraux de l’Education. S’ils ne sont frappés par l’impôt appelé contribution nationale.

Le syndicat des agents contractuels du système sanitaire de Côte d’Ivoire (Synacos-CI) et le syndicat national des agents contractuels de Côte d’Ivoire au ministère de la Santé (Syncopa[1]CI) n’ont pas encore arrêté d’exprimé leur mécontentement depuis la publication le 1er décembre 2023 du résultat du concours d’intégration des agents contractuels du ministère de la Santé de Côte d’Ivoire.

Avec des places accordées dérisoire, 200 pour près de 19 000 agents contractuels de la santé en activité. Ils n’ont pas la liberté de manifesté, puisqu’ils ont la solution : la trêve sociale est signée. Ils attendent aussi, un décret à l’effet d’absorber la totalité de l’effectif des agents contractuels du ministère de la Santé ayant passé plusieurs décennies à travailler sans un numéro de matricule et sans un minimum améliorant leur vie puisque confrontés à de nombreuses difficultés dans l’exercice de leurs activités.

Ils ne peuvent au nom de la trêve sociale parler des salaires qui ne respectent pas le SMIC ou SMIG, des salaires non réguliers, les primes de transport non respectées, des agents non pris en charge par la couverture maladie universelle, des agents non déclarés à la CNPS (ou même à la CGRAE) puisque cotisation non à jour. Mais si rien n’est fait, que peuvent-ils faire ? Réponse : la trêve sociale.

A quoi sert cette trêve sociale imposée de 2017 à 2027 ? 

Il était question d’un vrai programme social du gouvernement et l’amélioration des conditions de vie et de travail des fonctionnaires et agents de l’État. Depuis le protocole d’accord signé le 8 août 2022 à Abidjan, pour une durée de cinq ans allant de 2022 à 2027 qu’est-ce qui a déjà bougés ?

C’est le SILENCE qui bouge, prenant multiple formes. Intimidation, pression, baïonnette etc. Qu’en est-il de la question de l’adoption de la nouvelle grille salariale plus équilibrée après un audit de la masse salariale mise en rapport avec les ressources de l’État et comparée à celle d’autres pays de la zone UEMOA conformément au communiqué du Conseil des ministres du 19 décembre 2012 ?

Qu’en est-il de la question du relèvement de l’Indice référentiel de Base (IRB) ? Qu’en est-il de la question de la correction des décrets portant échelle de traitement des fonctionnaires et agents de l’État ? Qu’en est-il de la finalisation et la mise en œuvre de la réforme du système d’imposition des salaires consacrant la suppression de la Contribution nationale (CN) ? Etc. Mais l’engagement a été pris à ne pas rompre la trêve sociale par des grèves en s’obligeant de coopérer avec le gouvernement.

Et là, concernant des revendications communes de tous les fonctionnaires et agents de l’État et de celles spécifiques aux six familles d’emplois des fonctionnaires, notamment les secteurs Éducation et Formation, Scientifiques et Techniques, Administratif, Juridique et Diplomatique, Gestion économique et financière, Affaires sociales, Productions littéraire et artistique. Quelque chose a-t-il bougé ?

Refus du silence et petites doses de colère tout de même

Il y a le non-respect de la liberté syndicale avec plusieurs cas de violations qui fait réagir. La suspension abusive des salaires et les retenues disproportionnelles ; le blocage des comptes d’épargne des fonctionnaires en grève ; les mutations et affectations abusives etc.

Il ne faudrait perdre de vue que les grèves qui ont eu lieu et qui s’annoncent, résultent de la divergence liée à l’interprétation de la notion de trêve sociale par les différentes parties.

Si pour les organisations syndicales, la trêve sociale représente une opportunité de privilégier le dialogue permanant en ce qui concerne les nouvelles revendications, pour la plupart des membres du gouvernement et surtout pour les animateurs de la haute administration publique, la trêve sociale équivaut à la reddition des organisations syndicales qui mettraient ainsi en berne toutes leurs revendications jusqu’à 2027. Une mauvaise lecture de la trêve que les responsables de l’administration devront rectifier, car la liberté syndicale est un droit.

Une belle illustration à l’éducation nationale

Malgré deux ans de dialogue, l’absence de progrès dans les discussions sectorielles est constatée par neuf des onze fédérations des différents syndicats du Ministère de l’Éducation Nationale et de l’Alphabétisation (MENA), le 15 mars 2024. Ils reprochent notamment au DRH du MENA d’avoir retiré un document consensuel, fruit de la concertation entre les syndicats et l’administration, lors d’une rencontre avec la fonction publique. Cette décision unilatérale a été perçue comme un manque de respect envers le processus de dialogue social.

Les revendications portaient essentiellement sur l’administration scolaire et devraient résoudre toutes les incongruités qui la jalonnent en Côte d’Ivoire, et dont la correction est inscrite dans les conclusions des États généraux de l’Éducation Nationale et de l’Alphabétisation (EGENA).

En février 2024, lorsque le Ministère d’État, ministère de la Fonction Publique et de la modernisation de l’Administration, dans le cadre des ajustements des emplois pour une meilleure concordance avec le nouveau statut général de la fonction publique, invite le MENA (de Koné Mariatou)  à lui présenter ses propositions notamment en ce qui concerne la création de nouveaux emplois nécessaires, un document validé par l’ensemble des acteurs a été élaboré à cet effet.

Le DRH du MENA devait selon les syndicats au nom du ministère le présenter à une rencontre avec la fonction publique. Contre toute attente, et on ne sait pour quelles raisons décide de façon unilatérale et cavalière de retirer de sa présentation ce document, le fruit de la concertation menée jusqu’alors par les syndicats et l’administration. Ces fonctionnaires dépendant du ministère de Mariatou Koné exigent, alors un cadre de discussion constructif et productif, impliquant plusieurs ministères, pour un traitement diligent de leurs revendications.

Cette paix sociale ne doit que servir les riches ?

« Nous sommes d’accord, par principe, qu’après une discussion, il y ait un accord sanctionné par un protocole. Mais qu’on contraigne les travailleurs à renoncer à leur droit de grève, c’est la première fois que je vois ça. Et le cas de la Côte d’Ivoire est en train de faire école dans sous-région. Ce n’est pas du tout bon pour le travailleur ».

Cependant, pour paraphraser un leader syndical, cette paix sociale ne doit pas que servir les riches en les enrichissant davantage de sorte qu’ils narguent la classe sociale. La paix sociale doit profiter à la classe sociale. Malheureusement, la première trêve sociale signée en 2017 et la seconde de 2022 n’ont pas encore visiblement relevé le pouvoir d’achat des travailleuses et travailleurs ivoiriens.

Concernant l’objectif de la trêve qui consiste pour les syndicats à renoncer formellement à l’usage de leur droit de grève sur cinq années, en s’y obligeant, l’ensemble rejette cet aspect du protocole d’accord portant trêve sociale au regard même de principes fondateurs.

Le droit de grève est une prescription de la convention 87 de l’Organisation Internationale du Travail (OIT); s’obliger à y renoncer pour cinq ans constitue une violation flagrante de ladite convention. Avec cette subite montée de voix, que fera la légendaire Ministre de la fonction publique DÉSIRÉE ANNE OULOTO ? A SUIVRE 3 ….

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HERVE MAKRE

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