En condamnant avec fermeté, l’attaque de l’aviation israélienne contre le Qatar, le jeudi 11 septembre 2025, la Côte d’Ivoire a marqué une position diplomatique forte. Le communiqué officiel du ministère des Affaires étrangères exprime une « vive préoccupation », réaffirme la « solidarité au Gouvernement et au peuple du Qatar », et appelle à privilégier « le dialogue et la diplomatie ». Mais derrière cette sortie, se profilent à la fois des opportunités stratégiques et des risques géopolitiques pour Abidjan.

Depuis plusieurs années, la Côte d’Ivoire et le Qatar intensifient leur partenariat. La visite de l’Émir à Abidjan en 2017 a marqué un tournant, suivi en 2025 par de nouvelles discussions sur des accords d’investissements et de coopération économique.
Les échanges commerciaux, estimés à 25,8 millions USD en 2023, connaissent une croissance régulière et devraient s’accélérer grâce aux projets conjoints dans l’agriculture, l’énergie, le logement social et le tourisme. La tenue à Abidjan du Qatar Africa Business Forum symbolise d’ailleurs l’ancrage de Doha dans la stratégie africaine de la Côte d’Ivoire.
C’est donc dans ce cadre que s’explique la réaction ivoirienne : en défendant la souveraineté du Qatar, Abidjan protège un partenaire économique stratégique et confirme son attachement au droit international. Mais cette posture comporte aussi des défis.

D’un côté, la solidarité affichée avec Doha renforce l’image d’une Côte d’Ivoire souveraine, capable de peser sur la scène diplomatique africaine et mondiale. Elle traduit une volonté de s’aligner sur une vision multipolaire du monde, où la coopération Sud-Sud prend une importance croissante.
De l’autre, ce positionnement pourrait exposer Abidjan à des tensions avec ses autres partenaires stratégiques. Israël, malgré l’absence de relations historiques très profondes avec la Côte d’Ivoire, reste un allié de poids pour les grandes puissances occidentales dont Abidjan dépend sur le plan sécuritaire et financier.
Une prise de position trop marquée contre Tel-Aviv pourrait être perçue comme un désalignement, voire susciter des crispations diplomatiques.
En outre, dans un contexte régional instable où la lutte contre le terrorisme et la coopération sécuritaire dépendent largement des partenariats internationaux, Abidjan devra éviter que son rapprochement avec Doha ne soit interprété comme une prise de parti dans les rivalités du Moyen-Orient.

Ainsi, la condamnation de l’attaque israélienne par la Côte d’Ivoire dépasse le simple cadre d’un communiqué de solidarité. Elle reflète un choix stratégique : affirmer sa fidélité aux principes du droit international, tout en consolidant une relation bilatérale prometteuse.
Mais ce choix oblige Abidjan à un exercice délicat d’équilibrisme diplomatique entre ses alliances économiques émergentes et ses partenariats traditionnels.
Ledebativoirien.net
Par H.KARA
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