Législatives-le grand écart de Tidjane Thiam: entre le « Trop c’est trop » d’hier et le « Tout est parfait » d’aujourd’hui
L’arène politique ivoirienne est aujourd’hui le théâtre d’un revirement spectaculaire qui ne manque pas d’interpeller l’opinion publique et surtout les militants du PDCI-RDA. Et comme toujours, le rideau se lève… et c’est encore Tidjane Thiam qui entre en scène pour ne pas dire, Et cette énième fois, l’acteur principal, c’est bien Tidjane Thiam.

Hier encore, Tidjane Thiam montait au créneau. Il dénonçait la Commission Électorale Indépendante (CEI), contestait la fiabilité de la liste électorale, exigeait une nouvelle Révision de la Liste Électorale (RLE), et rejetait avec force tout le processus électoral. Son mot d’ordre était sans équivoque : “Trop c’est trop.”
Mais aujourd’hui, sans qu’aucune réforme n’ait été engagée, sans qu’aucune garantie n’ait été obtenue, tout semble soudain acceptable. La CEI ? Elle ne pose plus problème. La liste électorale ? Elle est validée sans réserve. Les législatives ? Elles sont désormais accueillies avec un enthousiasme débordant, un large sourire aux lèvres, et embrassées sans la moindre réserve.
Comme si les contestations d’hier n’avaient jamais existé. Comme si les morts du 11 octobre n’avaient jamais interpellé. Comme si la CEI, la liste électorale et le RLE n’avaient jamais été remis en cause. Tout est parfait, soudainement. Ce revirement brutal interroge. Comment peut-on passer de la contestation à la complaisance sans explication ? Comment peut-on engager un parti historique dans une telle volte-face sans consulter ses militants ? Le fond n’a pas changé, mais le discours, lui, s’est retourné.
Tidjane Thiam : La navigation périlleuse de l’apprenti politicien, entre déni et ambition démesurée. Une posture politique qui interroge

Tidjane Thiam évolue dans une zone grise, entre l’apolitique revendiqué et le politicien inachevé. Il veut coût-que-coût incarner le leadership politique, mais sans avoir pris le temps d’en maîtriser les fondements. Or, la politique n’est pas un rôle que l’on improvise.
C’est une discipline exigeante, un métier qui demande apprentissage, humilité et expérience. Refuser d’apprendre, c’est s’exposer à des prises de position maladroites, à des décisions incohérentes et parfois à des actes qui frisent le ridicule ou l’irrespect. Et c’est précisément ce que l’on observe : un homme qui veut gouverner sans écouter, qui veut rassembler sans consulter, et qui engage un parti historique sans en comprendre l’âme.
Une rupture de cohérence
Ce virage à 180 degrés, cette substitution d’une rhétorique de contestation par un optimisme soudain, laisse perplexe. Comment peut-on passer de la dénonciation d’un système à sa validation sans explication ? Comment peut-on engager un parti historique dans une telle volte-face sans consulter ses militants ? Tidjane Thiam doit comprendre que diriger un parti, ce n’est pas improviser une trajectoire personnelle, c’est incarner une volonté collective, fondée sur la mémoire, la cohérence et le respect des engagements.
Législatives, CEI, liste électorale : Le grand écart de Tidjane Thiam, entre le « Trop c’est trop » d’hier et le « Tout est parfait » d’aujourd’hui

Hier, l’homme clamait haut et fort : « Trop c’est trop ! », dénonçant avec vigueur les irrégularités du processus électoral. Aujourd’hui, face aux mêmes institutions, le discours a muté en un surprenant « Tout est parfait ».
Pourtant, sur le terrain, rien n’a fondamentalement changé. Sauf Thiam qui a changé. La Commission Électorale Indépendante (CEI) n’a pas été réformée en profondeur, la liste électorale demeure toujours la même, et le système dans son ensemble reste identique. Excepté Thiam qui a changé.
Ce revirement brutal, décidé sans le moindre débat de fond au sein du parti, résonne comme une trahison pour tous ceux qui ont cru à la ligne dure défendue jusqu’ici. Tidjane Thiam avance désormais en solitaire vers les législatives du 27 décembre, ignorant délibérément les martyrs du 11 octobre, ces vies sacrifiées pour une cause qu’il semble avoir abandonnée en chemin.
Il tourne le dos aux revendications portées par le Front Commun du président Gbagbo et lui, comme si elles n’avaient jamais existé, comme si la douleur des militants n’avait jamais compté. Ce mépris silencieux est une faute politique. Une faute morale. Une dette morale. Une faute historique.
Tidjane Thiam : quand on ne mange pas le porc, on ne boit pas sa sauce

C’est là que réside tout le paradoxe de la posture de Tidjane Thiam, un paradoxe que l’expression populaire résume avec une justesse implacable : “L’homme qui ne mange pas le porc, mais qui boit la sauce du porc.” Il rejette le fond du problème, refuse l’intégrité du processus électoral, mais profite sans gêne des bénéfices issus de sa non-participation à la présidentielle du 25 octobre, portée par le Front Commun.
Il dénonce le système à grands discours, mais s’y installe confortablement pour en récolter les fruits. Il parle de rupture, de renouveau, de “nouvelle ère” pour le PDCI-RDA, mais agit en parfaite continuité avec les logiques politiciennes qu’il fustigeait hier.
Cette contradiction flagrante entre un discours d’intégrité et une pratique opportuniste nourrit aujourd’hui un profond malaise au sein de la base militante. Un malaise fait de déception, de colère, et d’incompréhension. Car les militants, eux, n’ont pas oublié les morts du 11 octobre. Ils n’ont pas oublié les revendications du Front Commun. Et ils ne comprennent toujours pas comment, sans la moindre explication, le “Trop c’est trop” est devenu “Tout est parfait.”
L’Alliance PDCI-RDA-PPA-CI : un pacte sans consultation
Le Front commun avec le PPA-CI ? Aucune réunion du Bureau politique du PDCI-RDA. Aucune validation des instances du PDCI-RDA. Aucun débat avec les militants du PDCI-RDA. Le mouvement “Trop c’est trop” ? Lancé dans l’urgence, sans feuille de route claire, sans bilan partagé. Et lorsque le moment décisif est arrivé, celui de choisir entre cohérence et calcul, la décision a été prise seul, encore une fois sans consulter le parti.
La participation aux législatives ? Aucune concertation. Juste une déclaration présidentielle, sèche, tranchante, qui engage tout un parti… sans demander à personne.
Tidjane Thiam, ou l’art de passer du “Trop c’est trop” au “Tout est parfait”: Le Front Commun, une alliance éphémère : Du lancement en fanfare à l’arrêt de mort politique

Le Front commun entre le Parti des Peuples Africains – Côte d’Ivoire (PPA-CI) de Laurent Gbagbo et le Parti Démocratique de Côte d’Ivoire (PDCI-RDA) de Tidjane Thiam n’aura été qu’un feu de paille. Trois mois et vingt-et-un jours (3 mois et 21 jours). C’est le temps qu’aura duré cette union, née dans l’urgence, portée par la colère populaire militante, mais morte dans la divergence stratégique politique incohérente.
Lancée en grande pompe le mercredi 16 juillet 2025, l’alliance du Front commun, mais le jeudi 6 novembre, tout s’est effondré lorsque le PPA-CI a annoncé son boycott des législatives. Ce jour-là, le Front commun a signé son propre arrêt de mort. Depuis, il ne reste qu’un nom sans substance, une façade sans cohésion. Le Front commun est devenu ce qu’il ne devait jamais être : un front sans rien de commun.
PDCI-RDA : Un parti pris en otage
Ce qui choque, ce n’est pas seulement la rupture de l’alliance. C’est la manière. C’est le mépris des structures. C’est le silence imposé aux militants. C’est cette gouvernance verticale, autoritaire, où le PDCI-RDA devient l’instrument d’un homme, et non l’expression d’un peuple.
Le PDCI-RDA mérite mieux

Le PDCI-RDA n’est pas un marchepied pour des ambitions personnelles. C’est un héritage. Un patrimoine. Une mémoire. Une force collective. Il mérite un leadership qui consulte, qui rassemble, qui respecte. Pas un capitaine solitaire qui change de cap sans prévenir l’équipage. Thiam, le temps est un autre nom de Dieu Et ce temps, lentement mais sûrement, révèle les visages. Il dévoile les intentions. Il juge les actes. Les militants observent. Le peuple écoute. Et l’histoire retiendra non pas les slogans, mais les trahisons silencieuses.
Conférence de presse du vendredi 7 novembre 2025 : quand Thiam engage le PDCI-RDA sans ses militants
Ce vendredi 7 novembre 2025, au siège du PDCI-RDA à Cocody, une conférence de presse a été tenue par le député Simon Doh, président du groupe parlementaire du parti, aux côtés de Yapo Yapo Calice, le nouveau Secrétaire Exécutif en chef. L’annonce ? À partir de lundi, le PDCI-RDA entamera une série d’alliances politiques avec des partis partageant les mêmes valeurs démocratiques.
Un nouveau mouvement a même été lancé : le Rassemblement des Ivoiriens pour la Démocratie (RID), censé fédérer les forces autour du PDCI-RDA en vue des législatives du 27 décembre. Thiam n’est-ce pas une alliance de trop, parce qu’elle sera née sans débat, sans transparence, sans validation des instances?
Une annonce qui interroge… et qui inquiète
Derrière cette déclaration officielle, une série de questions brûle les lèvres des militants : Qui a été consulté ? Qui a validé cette orientation ? Où sont passés les débats internes ? Tidjane Thiam aurait-il mis les instances du parti sous scellés, verrouillant toute forme de dialogue démocratique ?

La gestion du PDCI-RDA devient chaque jour plus dramatique, frileuse et solitaire. Et comme le dit si bien le proverbe : “L’erreur est humaine, mais persévérer dans l’erreur est diabolique.” Tidjane Thiam semble croire que ses premières fautes relèvent de l’apprentissage.
Mais persister dans l’unilatéralisme, ignorer les voix du parti, et imposer sa volonté personnelle, c’est bafouer l’esprit même du PDCI-RDA, un parti né de la concertation, forgé dans le pluralisme, et porté par la voix collective de ses militants.
12. Le PDCI-RDA n’est pas une propriété privée
Monsieur Thiam, de quel droit engagez-vous le PDCI-RDA dans des alliances sans consulter le parti ? Ce parti est le patrimoine politique de nos aïeux, le fruit des sacrifices de générations entières. Derrière l’expression cinglante, se cache un profond malaise et une critique virulente de la gouvernance actuelle du PDCI-RDA.
L’idée que le parti historique ne soit plus qu’une simple entreprise individuelle, une SARL estampillée « Made Thiam », résume parfaitement l’indignation de ceux qui voient l’héritage d’Houphouët et Bédié confisqué par une logique entrepreneuriale. Il s’appelle Parti Démocratique de Côte d’Ivoire – Rassemblement Démocratique Africain, et ce nom porte en lui la mémoire, la rigueur et la collectivité militante.
Vous avez entre vos mains l’héritage de Félix Houphouët-Boigny et d’Henri Konan Bédié. Votre mission n’est pas de briller seul, mais de faire prospérer leur idéologie, de positionner le PDCI-RDA au-delà du niveau qu’ils ont laissé. Mais si vous continuez à gouverner sans écouter, sans consulter, sans respecter, alors votre nom ne sera pas inscrit dans les pages glorieuses du parti… Il sera gravé dans les annales des présidences les plus décevantes.
Le RID : un mouvement lancé dans le flou

Le lancement du Rassemblement des Ivoiriens pour la Démocratie (RID) aurait pu marquer un tournant stratégique, une opportunité de rassembler les forces vives autour du PDCI-RDA. Mais comment prétendre fédérer à l’extérieur quand on ne fédère même pas à l’intérieur ? Comment parler de démocratie quand les décisions sont prises sans les militants, sans les instances, sans débat ? Comment construire une nouvelle alliance quand la précédente celle avec le PPA-CI s’est effondrée sans même un échange franc entre les alliés ?
Monsieur Thiam, vous avez engagé le PDCI-RDA dans une alliance avec le PPA-CI sans consulter le parti. Et lorsque cette alliance a vacillé, vous avez décidé, seul, de participer aux législatives du 27 décembre. Sans même prendre la peine de vous asseoir avec le président Laurent Gbagbo pour vider le contentieux, clarifier les positions, ou acter une séparation digne. C’est dans la presse que le PPA-CI tout comme les militants du PDCI-RDA ont découvert votre décision.
Savez-vous le tollé que cela a provoqué sur la toile ? Les réactions ont été vives, indignées, amères. Mais je vous en épargne les détails. Ce que vous devez retenir, Monsieur Thiam, c’est qu’on ne construit pas une démocratie sur le mépris. Et encore moins un rassemblement sur le silence.
Le respect des morts, l’honneur des vivants : Un parti n’est ni un apanage ni un actif personnel

Monsieur le Président Tidjane Thiam, il est impératif de rappeler une vérité fondamentale : le Parti Démocratique de Côte d’Ivoire-Rassemblement Démocratique Africain (PDCI-RDA) n’est ni votre propriété privée, ni votre actif personnel. C’est l’héritage d’une nation et le sanctuaire des sacrifices d’innombrables vies.
En engageant le parti dans des décisions solitaires, prises à l’abri de toute consultation, vous ne faites pas preuve d’autorité, mais d’un mépris dangereux. Vous humiliez ainsi des milliers de militants qui, par leur dévouement et leur courage, se sont battus, parfois au péril de leur vie, pour que ce parti continue d’exister et de porter ses valeurs.
Mais l’humiliation va au-delà des vivants. Elle s’étend à la mémoire de ceux qui sont tombés sur le champ de bataille politique pour la survie et la grandeur du PDCI.
Et par extension, en trahissant l’esprit de concertation et d’unité, vous humiliez également les figures fondatrices du parti, le Président Félix Houphouët-Boigny et le Président Henri Konan Bédié, là où ils reposent. Leur héritage de dialogue et de rigueur semble piétiné par une logique de pouvoir solitaire, une voie qui menace l’âme même du PDCI-RDA.
Thiam, le choix entre dignité et humiliation
Il est encore temps. Le choix vous appartient : dignité ou humiliation. Mais sachez-le : si vous continuez à ignorer les voix du parti, les militants vous le rappelleront. Le PDCI-RDA appartient au peuple. Pas à un homme.
J’interpelle ici et maintenant les militants, les cadres et les sympathisants du PDCI-RDA

Militantes, militants, sympathisants du PDCI-RDA, le parti ne nous appartient pas à moitié il nous appartient pleinement. Le PDCI-RDA n’est pas la propriété privée de Tidjane Thiam. Ce n’est pas un laboratoire d’ambitions personnelles, ni un terrain d’expérimentation solitaire. C’est un parti forgé dans les luttes, bâti sur la concertation, nourri par la mémoire collective et le sacrifice de milliers de militants.
Mais aujourd’hui, que constatons-nous ? Des alliances politiques signées sans notre avis, ni en Bureau politique, ni en Congrès ordinaire, ni en Congrès extraordinaire. Des décisions prises dans les couloirs, loin des bases militantes. Des orientations stratégiques imposées sans débat, sans dialogue, sans respect des instances.
Ce n’est pas ainsi que l’on dirige un parti démocratique. Ce n’est pas ainsi que l’on honore l’héritage de Houphouët-Boigny et de Bédié. Et ce n’est pas ainsi que les militants du PDCI-RDA accepteront d’être représentés.
Conclusion : Le PDCI-RDA mérite mieux
Le PDCI-RDA mérite un leadership à la hauteur de son histoire. Un leadership qui écoute avant de décider. Qui respecte les instances au lieu de les contourner. Qui rassemble les militants au lieu de les diviser. Un leadership qui prend le soin de consulter la base, et non seulement son entourage immédiat. Un leadership qui ne confond pas autorité et autoritarisme, mais qui incarne la démocratie qu’il prétend défendre. Car le temps, dit-on, est un autre nom de Dieu.

Et tôt ou tard, pendant que les militants observent en silence, ce silence deviendra jugement. Ce peuple militant, que l’on croit passif aujourd’hui, jugera demain avec lucidité et fermeté. Et l’histoire ne retiendra pas les alliances signées dans les couloirs, ni les discours creux prononcés dans les salons. Elle retiendra la manière dont un homme aura transformé un parti en marchepied pour ses ambitions personnelles, au mépris de la mémoire collective et de la volonté militante.
Par Petrouce Pierre Nicaise GNAGNE (Membre du Bureau Politique du PDCI-RDA – Analyste politique – Chroniqueur – Éditorialiste –Consultant en Stratégie Électorale et Gouvernance).
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