En Afrique francophone, la tradition du « 1 coup k.o » est en train de s’enraciner fortement avec les tenants du pouvoir, qui ne veulent rien lâcher. Le président sortant du Bénin, Patrice Talon, a été réélu, sans surprise. À l’issue du scrutin du dimanche 11 avril 2021, il a obtenu 86.37% des suffrages exprimés, au premier tour du scrutin. En Côte d’Ivoire, Alassane Ouattara, pour son 3è mandat et le premier de la IIIè République, a plané avec 94.27% des voix, au scrutin du samedi 31 octobre 2020.
La démocratie africaine francophone finit par apparaître comme un cache-sexe. Elle évolue sur les traces indélébiles du parti unique avec une seule et unique différence: multiplicité des candidatures certes mais des violences pré- et postélectorales avec de nombreuses victimes. Dans son discours au sommet de La Baule (19 au 21 juin 1990), François Mitterrand a relevé les bretelles aux chefs d’État africains, exigeant d’eux de développer la démocratie dans leur pays à l’image des Européens de l’Est. Ceux-ci avaient profité de la chute du mur de Berlin (9 novembre 1989) pour s’affranchir du communisme.
Le chef de l’État français subordonnait alors l’aide de son pays à la mise en œuvre de reformes politiques. Et partout ou presque, dans ces pays sous perfusion et ajustement structurel, ce fut la course avec la mode des conférences nationales et la proclamation du multipartisme. C’est du pipeau. Si le pluralisme politique a réveillé les antagonismes ethniques qui couvaient sous la cendre, il a brisé le fragile consensus social, permettant aux puissances occidentales d’instrumentaliser ces divisions pour mieux asseoir leur influence et leur présence.
Les règles du jeu (constitution, conditions d’éligibilité, etc.) sont le fait du prince. Comme au temps du parti unique. Il les change à sa guise, en violation flagrante de la séparation des pouvoirs, pour mettre les bâtons dans les roues de ses adversaires. La souveraineté du peuple, bâillonnée, se trouve alors piétinée impunément. Et face à des manifestations réprimées et vite circonscrites d’une opposition désordonnée, désorganisée et en panne de stratégie, les dés sont pipés pour la pérennisation des pouvoirs autocratiques dans des pays où il y a la démocratie sans démocrates.
Par F. M. Bally