ABIDJAN-CISSE AÏSSATOU SY SEYE: «LA JOURNEE INTERNATIONALE DE LA FEMME UNE RECONNAISSANCE DE SON MÉRITE POUR CE QU’ELLE FAIT ET FERA»

Elle a été choisie parmi les femmes qui font bouger la Côte d’Ivoire, par des organisations et associations féminines telles la ‘‘Fondation des Archanges’’ ou ‘‘Belles femmes’’, pour être la marraine de la cérémonie de la journée internationale de la femme 2016 à Akouédo, en Côte d’Ivoire. Dame Cissé Aïssatou Sy Seye  se dévoile ! 

LEDEBATIVOIRIEN.NET: Les femmes prennent de plus en plus de place dans le développement de leur pays, notamment en Côte d’Ivoire. Qu’est-ce que cela vous fait d’être citée en exemple de femme leader?

Aujourd’hui, être citée en exemple de femme leader, c’est  à notre avantage parce que nos jeunes sœurs ont besoin de suivre notre exemple. À savoir inculquer de bonnes valeurs, de faire le travail correctement. Inspirer une dynamique à nos jeunes sœurs qui ont besoin de modèles pour pouvoir se faire. Alors si nous avons la chance d’être au-devant  pour les tirer et les pousser c’est à notre avantage.

 Des femmes sont à la tête d’entreprises privées autrefois disait-on, activité dévolue aux hommes; dans  votre cas, comment l’expliquez-vous ?

Ecoutez, moi je ne suis pas d’accord avec ceux qui défendent cette thèse qu’il y a des métiers réservés uniquement aux hommes et d’autres aux femmes. Non ! Toute activité peut être entreprise soit par les femmes soit par les hommes. C’est pourquoi, de  plus en  plus, l’on parle de la parité du genre.  Bien entendu pour être professionnel dans ce que l’on fait, il faut se former. Il faut montrer qu’on a la capacité d’entreprendre les prestations qu’on vous confie. Il faut montrer qu’on a la capacité de diriger, parce qu’un bon dirigeant, c’est celui qui sait écouter, c’est celui qui sait partager avec son personnel,  avec ses fournisseurs et avec ses clients. C’est celui qui sait respecter ses engagements.

C’est tout un environnement qu’il faut gérer. Aujourd’hui il n’y pas de métiers réservés à un genre.  Nous sommes  pour la promotion du genre et c’est l’équité que nous recherchons.

Au constat, vous vous plaisez dans ce que vous faites, c’est-à-dire dans la peau du transporteur à l’image des transporteurs de renommés, les Inza  Diaby, Kassoum Coulibaly  reconnus comme tels en Côte d’Ivoire. Qu’en dites-vous ?

Pour  nous, c’est un plaisir de suivre les traces de nos doyens. Vous avez cité Inza  Diaby, Kassoum Coulibaly, il y a eu El Hadj Lanciné Cissé  qui fut  mon beau-père puisqu’il n’est plus, paix à son âme.  C’est  lui qui nous a inculqué  cet amour  pour le transport. C’est vrai qu’aujourd’hui je me retrouve gérante d’une entreprise de transport  par la force des choses et que j’apprécie parce que j’ai  pu comprendre cette activité. Je me dois d’emmener mon entreprise à émerger. Et à être un modèle  pour d’autres transporteurs qui voudraient s’exercer dans le domaine du transport du personnel de société. C’est un réel challenge d’être dans l’élite.

 

Vous êtes citées parmi les femmes qui font bouger la Côte d’Ivoire, qu’est-ce que cela vous fait d’être sollicitée par  des organisations et associations de femmes  pour les guider?

J’ai d’abord en moi l’esprit du partage. Partager avec  mes sœurs l’exemple de ma petite réussite. Leur faire comprendre qu’on n’a rien dans la facilité. Il faut croire en nous, croire en ce que nous faisons. Il faut diriger son entreprise ou ses activités sur des  orientations que l’on se fixe et chercher à les réussir.

Dans l’entreprenariat féminin surtout, je fais comprendre  à mes sœurs qu’il ne sert  à rien d’avoir  plusieurs activités à la fois. Je leur recommande d’avoir une activité et bien la faire. Etre professionnelle dans ce qu’on leur demande de faire. Au-delà de ce professionnalisme,  elles démontreront leur valeur: le travail bien fait.

J’ai été contactée dans le cadre de ma Fondation créée depuis 2009 et qui œuvre pour la scolarisation de la jeune fille et l’accompagnement de la femme,  par une association de femme veuves et des déshéritées, ‘‘Belles Femmes’’, dont les membres ont besoin d’être accompagnés et d’être soutenus. Elles ont décidé que je sois leur marraine, que je sois là pour leur prodiguer  des conseils afin de mieux gérer leurs activités et voir dans quelle mesure leur apporter un soutien. Et c’est ce que je fais et compte faire pour mes sœurs. 

Pouvez-vous nous parler de  votre parcours qui inspire tant les autres femmes ?

 J’ai travaillé à la multinationale Air Afrique durant 24 ans où j’ai été l’assistante de direction de  plusieurs directeurs généraux. Et là-bas j’ai commencé mes armes au niveau primaire, aux ressources humaines, puis j’ai émergé pour me retrouver, assistante du directeur général. Mon expérience  professionnelle  m’a aidé parce que j’ai voulu apprendre. Déjà à l’âge de 18 ans, j’ai voulu mon indépendance. J’ai travaillé très jeune. Et c‘est une valeur que je veux  inculquer à mes jeunes sœurs.

Parallèlement  à mes charges au travail, j’aidais  mon époux qui était déjà dans le transport terrestre alors que moi j’exerçais dans le transport aérien. Nous avions  les  mêmes difficultés sauf que dans le secteur aérien c’était mieux structuré. Donc nous échangions beaucoup sur la question. Avec mon expérience, nous envisagions déjà d’investir dans ce que nous entreprenions.

Lorsque je rentrais du boulot je me rendais auprès de lui ! J’apprenais et j’échangeais avec lui sur tout. C’est comme cela que l’envie de me frotter au transport terrestre m’est venue. J’appréciais déjà le fait de mettre des moyens de transport privé à la disposition des employeurs et de l’Etat. Et de voir que le personnel, les employeurs et employés étaient contents de se voir transporter  à leur lieu de travail à l’heure et en toute quiétude dans le confort.

C’est comme cela que l’envie est née de vouloir aider mon époux dans son activité professionnelle. Et en 2004, j’ai arrêté avec la multinationale avec les liquidateurs. Je me suis mise à travailler avec mon époux. Il m’a mise automatiquement dans le secteur difficile qui le fatiguait le plus : la gestion des lubrifiants et du carburant. Et comme les femmes sont beaucoup plus patientes sur certains points, il était soulagé  de ce côté-là ! Puisqu’il voulait savoir si j’aimais ou pas. Il était soulagé puisque le fait pour moi d’être dans ce secteur  lui a permis de faire beaucoup de bénéfice.

J’étais responsable des postes qui causaient problème ce qui lui a permis de bien organiser l’activité. Malheureusement en 2007, il nous a quittés, rappelé à Dieu. J’ai dû par la force des choses reprendre la société et j’en ai fait une SARL dont je suis la gérante.

Donc, c’est un parcours assez difficiles avec de bons et  de mauvais souvenirs.  Mais c’est toujours les bons souvenirs qui doivent l’emporter, puisqu’on se sert des mauvais pour avancer. Parce que les bons souvenirs ce sont des acquis et les mauvais on en fait des forces et on avance… 

C’est dire que  votre activité au sein de la multinationale vous a aidé dans cette nouvelle activité !

Cela m’a été effectivement d’un grand soutien parce que j’étais dans la multinationale mais en même temps je me formais à la gestion, au renforcement de mes capacités. Je ne suis pas du genre à me contenter de ce que j’ai et dire, que Dieu aille faire le reste. Rien n’est facile dans la vie. Pour pouvoir montrer que nous sommes des femmes entreprenantes qui réussissent dans les charges qu’on nous confie, il faut accepter  d’être formées, de faire des stages de perfectionnement…

Que ne referiez-vous pas en tant que femme leader ?

Ce que je ne referais pas si c’était  à refaire en tant que femme leader, c’est d’éviter d’être égocentrique. On ne doit pas être égocentrique. Le leadership,  c’’est la volonté de pouvoir partager avec les autres. C’’est la volonté de  pouvoir tirer les autres vers le haut, c’est  la volonté de communiquer avec les autres. Etre plus ouvertes, être plus  proche de  mes sœurs être plus à leur écoute. Lorsqu’une personne vient vers vous, c’est parce qu’elle a une faiblesse et veut comprendre; donc  il faut être très proche de cette personne pour pouvoir la soulager, pour pouvoir la soutenir. Tout réconfort n’est pas que financier. Même une parole soulage, une approche soulage. Le rôle du leader c’est le don du partage et non le don de l’égocentrisme…

 La Fondation des Archanges vous a désignée pour être la marraine des activités  à l’occasion de la Journée Internationale de la Femme édition  2016, que représente  pour vous cette journée ?

Cette fête concerne toutes les femmes. Pas seulement celles qui sont professionnelles  ou qui travaillent dans des entreprises. Mais dans tous  les secteurs d’activités et spécialement la femme qui travaille dans la campagne et qui est au foyer. C’est le mérite et le rôle de la femme qui sont reconnus et célébrés. La femme rurale comme la femme urbaine ou celle des  bureaux ou dans les champs, celles qui se réveillent tôt. C’est  le mérite qu’on reconnait en la femme. Alors quand on se donne  un jour pour dire à cette femme-là : merci  pour ce que tu fais, pour ce que tu sais faire et pour ce que tu feras ! C’est une très bonne chose et c’est très important. C’est une fête qui  invite la femme à se  prendre en charge.

Nous avons en tant que  femme leader la mission d’inculquer les bonnes valeurs à nos sœurs, elles en ont besoin. Il faut  inviter la femme et la jeune fille au changement de mentalité; car, une vendeuse de pagnes est chef d’entreprise, une vendeuse de bannes est chef d’entreprise, une femme vendeuse d’attiéké est chef d’entreprise. Puisqu’elle doit participer à l’épanouissement de sa famille. Donc cette fête et très importante  pour la femme ! 

Que dites-vous  à la jeune fille en  particulier ?

Je demande à toutes les jeunes filles de prendre leurs études aux sérieux et je dis aux parents de scolariser leur fille. Il faut qu’on les encourager. Une personne analphabète est un handicap, car c’est difficile de penser que le taux d’analphabétisme soit aussi élevé en Côte d’Ivoire. Et cela fait mal de voir qu’au  21ème siècle il y a encore des analphabètes. Il nous faut lutter contre l’analphabétisme, et c’est ce que je fais pour mes sœurs.

Il nous faut encourager les filles, c’est le rôle du leader. C’est de montrer aux autres femmes qu’elles ont la  capacité. La femme leader doit impulser la capacité des autres et les pousser à sortir d’elles-mêmes et  à croire en leurs capacités…

 La jeune fille doit apprendre à compter sur elle-même en s’appuyant sur les qualités développées par la femme leader. Il faut se concentrer et se consacrer à ce que nous faisons.  Ce n’est pas la fortune qui rend heureux ! C’est  de gagner  dignement ce que l’on reçoit. Mais il faut beaucoup de courage pour aller au bout des études. Le chemin de la facilité n’est forcément le bon mais, c’est le plus difficile qui est le meilleur !

 Je salue toutes ces femmes qui se battent au quotidien et nous les femmes leader avons pour rôle de les accompagner et de les soutenir dans cet élan. Je saisis votre micro pour remercier votre rédaction et dire que je là et je serai là pour accompagner toutes mes sœurs nos seulement  à l’occasion de la journée  internationale de la femme mais dans leurs activités en les orientant!

Entretien réalisé 

par HERVE MAKRE

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