«Nous ne reculerons pas » Un sit-in sur le site de Palmafrique
Les communautés de villages d’Elokato, Elokate et M’Batto Bouaké, dans le cadre de l’affaire de spoliation de leurs terres par PALMAFRIQUE au profit de la SCI PALMAFRIQUE IMMOBILIER d’une superficie totale de 2 339 hectares, située dans la sous-préfecture de Bingerville, donnent encore de la voix depuis, le dimanche 15 juin 2025.

Une marche pacifique de protestation avait été programmée pour le 21 mai 2025, et reportée sine-die à la suite d’une rencontre avec les l’autorité de la Sous-préfecture ce jour-là le Sous-préfet prend l’engagement que le Ministre de la Construction, du Logement et de l’Urbanisme envisageait de recevoir incessamment, les communautés villageoise. Simple diversion, et pour cause.
Dans un esprit de paix et de responsabilité, les représentants des trois villages acceptent de suspendre la manifestation, dans l’espoir d’un dialogue constructif avec le Ministre. Mais force est de constater qu’à ce jour, la promesse n’était qu’un leurre, un simple artifice destiné à désamorcer la mobilisation et à diviser l’unité des trois villages face à cette situation cruciale.
Depuis cette annonce, aucune date concrète, aucun signal officiel, aucune avancée réelle n’a été enregistrée. Devant ce que ces villageois qualifient de mépris des autorités pour leurs administrés, elles ont crié encore.

« Nous dénonçons fermement cette stratégie de diversion, indigne de l’État, et contraire aux principes fondamentaux de transparence et de concertation avec les communautés locales », déclarent les populations et d’annoncer des actions :
« Face à cette situation, nous annonçons la reprise immédiate de nos actions : l’organisation d’une nouvelle marche pacifique, dont la date sera communiquée dans les jours à venir.
La saisine du Conseil d’État pour dénoncer les actes illégaux posés par le Ministère. Un sit-in sur le site de Palmafrique, organisé par les populations d’Eloka et de M’Batto Bouaké à partir du 22 juin 2025 », et d’ajouter avec fermeté.
« À compter de cette date, les mesures suivantes seront mises en œuvre : Interdiction d’accès aux agents de Palmafrique sur nos terres. Interdiction de récolter tout produit issu de nos plantations ; Départ immédiat de tous les agents de Palmafrique présents sur nos plantations et dans nos sites d’habitation. Fin de toute légitimité des agents de Palmafrique sur le site, suite à la radiation des clauses et à la rupture du partenariat entre cette entreprise et nos villages. Clôture des travaux de la commission chargée du suivi ».
Appel à la solidarité nationale et internationale
« Nous en appelons à la société civile, aux leaders d’opinion, aux ONG, aux communautés sœurs à travers le pays, aux chefs traditionnels, aux femmes, et aux jeunes : Tenez-vous à nos côtés. Car notre combat est aussi le vôtre : il s’agit de défendre notre dignité, notre patrimoine, et nos droits historiques.

Nous appelons également les médias à relayer largement notre lutte légitime, et à continuer d’exercer leur mission d’éclaireurs et de garants de la démocratie.
Les populations d’Elokato, Elokate et M’Batto Bouaké ne reculeront pas. Nous sommes ouverts à un dialogue sincère, mais jamais à la tromperie. Si l’État reste sourd, nous ferons entendre notre voix dans la rue et devant la loi », déclare le Comité des Cadres des villages Eloka (Elokaté et Elokato) et M’Batto Bouaké, le 15 juin 2025 villages pour la Défense de leurs terres occupées par Palmafrique. Un Comité conduits par Anderson Adié, Boka Raoul, Assandré Nicaise, Olivier, Akobey Romain Roland etc.
Le silence du ministère de laConstruction face à la demande de la rédaction
La requête de Ledebativoirien.net réceptionnée par le cabinet du Ministre de la Construction, du Logement et de l’Urbanisme, le 27 mai 2025 est à ce jour, sans réponse. La rédaction par sa correspondance attendait du ministre Bruno Koné Nabagné un véritable éclairage de cette situation qui prévaut entre ces trois villages de la Sous-préfecture de Bingerville et Palmafrique.
C’est que, depuis 2008 un accord a été trouvé par la signature d’une convention entre les villages concernés et la société Palmafrique. Et que le 20 mars 2023 le, ministère de la Construction à la

demande du Directeur Général de la société Palmafrique, Thierry Davailles, a procédé à la radiation de la ‘‘clause d’usage rural’’ portant sur 23 392 828 m² de terrain à Eloka (Elokato et Elokaté) et M’batto Bouaké sans la moindre consultation des propriétaires coutumiers concernés, pour ce déclassement desdites terres par l’Etat ivoirien.
Ils soutiennent aussi avoir engagé une procédure d’immatriculation des terres conformément à la loi 2020-624 du 14 aout 2020 portant Code de l’Urbanisme et du domaine foncier urbain. Mais qu’à leur étonnement le Ministre de la Construction du Logement et de l’Urbanisme par courrier en date du 6 septembre et 9 octobre 2023, avez affecté 19.179.200 m² sur les 23.392.228 m² soit 80% de leurs parcelles sises à Eloka et M’Batto Bouaké à une société privée dénommé SCI Palmafrique Immobilier.
Une affectation en plusieurs bloc appuyée par l’arrêté n°23-0000, du 20 mars 2023 portant radiation de la clause d’affectation « à usage exclusif de vente des produits récoltés et terrain rural » de la parcelle de terrain d’une superficie de 23.392.228 m², sis à ELOKA, Sous-Préfecture de Bingerville, objet de Titre Foncier N°18.516 de la Circonscription Foncière de Bingerville/ Allobé. Le cabinet du Ministre Bruno Koné n’a pas encore suffisamment le temps pour répondre au courrier de la rédaction.
Retour sur une colère régulière et légitime
Des terres héritées de leurs ancêtres et garantes de leur identité, de leur culture et de leur survie économique, sont donc, aujourd’hui l’objet de convoitises sans précédent. Des acquisitions foncières opaques, des accaparements déguisés sous couvert de projets dits de développement, sont dénoncés.

Le village d’Eloka (Elokaté et Elokato) et de M’Batto Bouaké, situés dans la Sous-Préfecture de Bingerville, sont des villages autochtones Atchan et Gwa.
Depuis des générations, ce peuple vit sur ces terres objet de convoitise, les cultive, les protège, et y puise son identité. En 1928, la Société des Plantations de l’Afrique de l’Ouest (SPAO) a réquisitionné, sous le régime colonial, les terres des villages d’Elokato, d’Elokate et de M’Batto-Bouaké à des fins agricoles, sans purge des droits coutumiers ni indemnisation. Détruisant les plantations de cacaoyers, caféiers, cultures vivrière et des campements villageois, et ce, malgré les protestations de la communauté villageoise et du chef coutumier d’alors Antoine Djoro.
Dans les années 1960, dans un contexte de politique agricole nationaliste, l’État ivoirien (indépendant) a procédé à l’expropriation de milliers d’hectares sans respect des procédures légales, ni reconnaissance des droits coutumiers des populations d’Eloka et de M’Batto Bouaké pour promouvoir diverses cultures de rentes.
C’est dans cette dynamique que le 02 mai 1964, l’Etat Ivoirien crée la Sodepalm devenu aujourd’hui Palmafrique en remplacement de la SPAO à travers les arrêtés N°604 et 837AGRI/DOM de l’année 1964, et ce dans la valorisation de la culture du palmier à huile.

Une fois encore, cette communauté cède ses terres sans dédommagement pour cause d’utilité publique. Mais dans l’exécution de ses travaux, la Sodepalm va empiéter sur les terres restantes de la communauté villageoise.
A la suite de nombreuses interpellations, le président Félix Houphouët-Boigny, promet la rétrocession des terres occupées par Sodepalm, après un certain nombre d’année, 27 ans d’exploitation. Dans les années 1996, à la faveur de la politique de privatisation les ex-sociétés d’Etat Sodepalm puis Palmindustrie devenues aujourd’hui Palmafrique continue d’exploiter les terres d’Eloka et de M’Batto Bouaké.
Une situation qui rudoie les communautés villageoises
Dès les années 1960, l’Etat de Côte d’Ivoire s’est donc approprié la parcelle de 2339 Ha 28 A 28 Ca appartenant aux villages suscités et l’a concédée à la société d’Etat, de spécialité agro industrielle dénommée SODEPALM. Dans le cadre de sa politique de Privatisation, la société est rachetée à l’Etat en novembre 1996, par Palm Industrie devenue, aujourd’hui Palmafrique qui bénéficie du droit d’usage et droit de jouissance, prescrit par bail emphytéotique d’une durée de 99 ans à compter de novembre 1996 sur la parcelle soutient la Société.
Les Communautés villageoises de ELOKA et de M’Batto Bouaké ont réclamé à l’Etat de Côte d’Ivoire le retour dans son domaine privé de ladite parcelle, à travers une correspondance, au ministre de l’Agriculture et des Ressources Animal et réceptionnée, le 27 juin 1996 à la Présidence de la République.

En réponse audit courrier, le président de la République de Côte d’Ivoire, Aimé Henri Konan Bédié, a, par courrier numéro 4124 PR/DAC, en date du 09 octobre 1996, informé la communauté villageoise de son engagement ferme de rétrocéder ladite parcelle de forêt aux autochtones du village de ELOKA, afin de leur permettre d’entreprendre des exploitations agricoles individuelles.
Pour procéder à l’entrée en pleine jouissance de ce bien, feu le Président Aimé Henri Konan BEDIE, instruit le Ministre de l’Agriculture d’alors, par courrier référencé numéro 4123/CAB ADJT/96, de trouver solution urgente aux préoccupations de la Communauté villageoise de ELOKATO.
« Je vous prie de me faire part de la solution que vous aurez envisagé face à la préoccupation des populations d’Elokato portant d’une part sur la rétrocession d’une parcelle de terre aux populations pour les cultures vivrières et, d’autre part, la cession aux même populations, les parts représentant leur » droit de propriété » lors de la privatisation de la Palmindustrie », insiste le chef de l’Etat Bédié préoccupé par la situation.
Une affaire de gros sous à l’huile de palme ?
Cette situation conduit la société Palmafrique à signer une convention avec la communauté villageoise du fait du bail emphytéotique en avril 2006. La communauté villageoise requiert de la part de la société en contrepartie de cette occupation de longue durée une redevance. Ainsi, depuis 2008, les villages d’ELOKA et de M’Batto Bouaké percevaient de la part de Palmafrique dans une convention les liant la somme de cinq millions (5 000 000f CFA) par an par village comme redevance jusqu’en 2023 en contrepartie du droit d’usufruitier à eux concéder.

Dans cette convention il est dit à l’article 2 des engagements des parties que Palmafrique doit au préalable informer les communautés en cas de cession de la parcelle exploitée à toute personne physique ou morale. Dans l’attente de la rétrocession des terres, que la communauté villageoise apprend que la société Palmafrique, par l’intermédiaire de son Directeur Général, a introduit une demande de radiation des clauses en date du 11 Janvier 2023 et enregistré au Guichet Unique du Foncier sous le numéro RC-202300000593 du 31 Janvier 2023.
Le 20 mars 2023, le Ministère de la Construction du Logement et de l’Urbanisme fait droit à la demande de la Société Palmafrique en prenant l’arrêté N° 23-00001/MCLU/DGUF/DDU/SAS/ DB/RK portant radiation de la clause d’affectation « à usage exclusif de vente des produits récoltés et terrain rural » de la parcelle de terrain d’une superficie de 23 392 828 m2, sise à ELOKA. Dans cette même dynamique.
Le Ministre de la Construction du logement et de l’urbanisme, Bruno Nabagné Koné, par courriers en date du 6 septembre et 9 octobre 2023, a affecté 19.179.200 m² sur les 23.392.228 m² soit 80% des parcelles sises à Eloka et M’Batto Bouaké à une société privée dénommé SCI Palmafrique Immobilier. Cette affectation est faite en plusieurs blocs selon les courriers.
Dans le courrier le Ministre de la construction demande au bénéficiaire de se rapprocher des services compétents du guichet unique du foncier pour le dépôt d’un dossier de demande d’Arrêté de Concession Définitive (ACD).

En fait, une réponse à la société Palmafrique qui avait introduit une demande d’ACD auprès des services du ministère de la Construction et du logement et de l’urbanisme, le 20 avril 2023, au nom et pour le compte de la Société SCI Palmafrique Immobilier.
Les communautés villageoises ayant ouïe cette information engage une opposition à délivrance d’ACD par courrier en date du 1er août 2023. De ce fait, l’Usine d’Eloka est en arrêt depuis plus de 9 mois et toutes les cueillettes des régimes de graines sont acheminées vers Anguédedou S/P de Dabou. Tout le personnel essentiel à la production et à l’entretien ainsi qu’une partie de la sécurité ont rejoint leur nouveau poste d’affectation.
Mais les communautés villageoises par courrier en date du 08 mai 2023 réceptionné, contexte cet état de fait et le 10 mai, réclament la rétrocession de leurs terres. « Les parcelles étant revenues dans le patrimoine foncier des villages, les communautés ont décidé de les immatriculées à leur profit et c’est à juste titre que les autorités compétentes ont été saisis.
Dans l’attente des résultats de l’enquête publique de mars et avril 2024 relative auxdits parcelles que nous découvrons que le Ministre de la construction de l’urbanisme et du logement a procédé la quasi-totalité de ces parcelles à une structure dite SCI Palmafrique Immobilier créée de toutes pièces par des particuliers à dessein », soutient le Comité des cadres des villages d’Eloka et M’batto-B pour la Défense de leurs terres occupées par Palmafrique.

« Ces terres appartiennent historiquement à notre communauté, selon le droit coutumier reconnu par la loi ivoirienne (loi n°98-750 du 23 décembre 1998 sur le foncier rural.Que nous n’avons jamais cédé ces terres à titre définitif à Palmafrique, ni à ses successeurs.
Que nous n’avons jamais donné notre consentement libre, préalable et éclairé à Palmafrique pour exploiter notre patrimoine foncier à des fins que leur objet social. Nous exigeons justice, reconnaissance et réparation ».
Les communautés d’Eloka et de M’Batto-Bouaké annoncent une nouvelle marche pacifique et un sit-in sur le site de Palmafrique. A SUIVRE.
Ledebativoirien.net
HERVE MAKRE
Sauf autorisation de la rédaction ou partenariat pré-établi, la reprise des articles de www.ledebativoirien.net, même partielle, est strictement interdite. Tout contrevenant s’expose à des poursuites.
En savoir plus sur LE DEBAT IVOIRIEN
Subscribe to get the latest posts sent to your email.