La Cour Pénale Internationale va sans doute se rallumer une dernière fois dans l’affaire Gbagbo et Blé Goudé. Les 22 et 24 juin prochains, elle prévoit en effet deux audiences qui vont décider du sort de l’appel formulé par Fatou Bensouda à l’issue de la décision d’acquittement prononcée par les juges de la chambre de première instance en janvier 2019. La procureure gambienne, sur le départ après un mandat catastrophique, y joue son va-tout mais sa situation est désespérée.
Et on peut dire que cela lui a même souri d’une certaine façon pendant une semaine d’abord puis pendant un an, ou presque, lorsque les deux acquittés, chose jamais vue dans les annales de la justice, ont vu la preuve de leur innocence être assortie d’une liberté conditionnelle.
Finalement, en mai, la chambre d’appel remettait les compteurs à zéro, les deux acquittés pouvant à nouveau aller où bon leur semble, avec le devoir de rappliquer pendant les audiences que nécessiteront la procédure d’appel. Nous y voilà donc et les arguments de Fatou Bneouda vont maintenant être scrutés de fond en comble et disséqués.
Prières païennes autour d’un procès bouclé
La cour en sortait d’ailleurs d’autant plus gênée qu’elle avait donné le temps nécessaire à la procureure de chercher les preuves pouvant confondre les deux hommes. Pour ce faire, deux des trois juges avaient foulé aux pieds le sacro-saint principe du doute en droit bénéficiant à l’accusé mais également ignoré les mises en garde de la juge belge Christine Van den Wyngaert qui écrivait, dans son opinion dissidente en novembre 2014, que les preuves fournies par la procureure contre Laurent Gbagbo ne respectent pas les standards habituels en matière de preuve même si ceux-ci ont d’ordinaire été bas.
Cinq années plus tard, c’est à sa conclusion qu’a fini par se rallier la chambre de première instance qui ne laissait pas le soin à la défense de présenter ses témoins et décidait, au terme de son verdict majoritaire, d’acquitter les deux hommes.
La honte en vue ?
La procureure Fatou Bensouda veut, pour ainsi dire, avoir un droit de harcèlement sur les deux hommes contre lesquels elle pourrait alors, dans un tel cas de figure, reprendre ses enquêtes et rechercher les preuves pouvant faire mouche. De bout en bout, elle aurait alors eu trois chances supplémentaires de coincer l’ancien président ivoirien et son ministre de la Jeunesse. Et si l’on peut, d’emblée, imaginer que la Gambienne ne veut pas s’avouer vaincue parce que c’est aussi son honneur qui est en jeu, sa qualité de procureur avec, on peut pas non plus évacuer le fait qu’elle poursuive un but politique.
SEVERINE BLE (AUJOURD’HUI)