Défense : la Chine va-t-elle suivre l’exemple de la Russie en Ukraine et envahir Taiwan en 2025 ?

« Le sort de Taiwan se joue en Ukraine » avait affirmé la présidente de l’île Tsai Ing-Wen en 2023.  Ainsi en dépit des manœuvres militaires chinoises autour de l’île, elle exhortait les États-Unis à se préoccuper davantage de l’Ukraine afin de ne  pas laisser la Russie l’emporter. Il ne fait aucun doute dans les esprits qu’un tel scénario pourrait amener la Chine à « passer à l’acte », dans sa volonté de « récupérer » Taiwan. Interrogé par un journaliste américain en 2022 peu après l’invasion de l’Ukraine, sur la réaction des Etats-Unis en cas d’invasion de Taiwan par la Chine, le président Joe Biden a répondu sans hésitation que l’Amérique défendrait Taiwan. Pour les analystes, cette réponse ferme et directe a été « prise en compte » par le régime chinois.

En fait, la Chine a plus de légitimité à envahir Taiwan que la Russie n’en avait lorsqu’elle a envahi l’Ukraine. La Russie a parlé de « dénazifier » le pays, et protéger la minorité russophone qui se trouve à l’Est, des raisons assez floues.  Or Taiwan est une île qui appartenait à la Chine avant que le gouvernement nationaliste de Tchang Kai Tchek qui venait de perdre la guerre contre les communistes de Mao Tse Toung sur la partie continentale en 1949, ne s’y installe pour proclamer une république.

Jusqu’en 1970, les deux Chines ont cohabité aux Nations Unis. D’un côté la République de Chine (Taiwan), et de l’autre la Chine continentale ou République Populaire de Chine.  L’île de Taiwan était reconnue par une majorité de nations, y compris les nations africaines, comme étant la Chine « officielle ». Mais dans les coulisses de l’organisation, la bataille faisait rage pour désigner la nation qu’il fallait reconnaître comme la seule entité représentant le peuple Chinois. Finalement en 1971, la République Populaire de Chine (RPC) l’emporta et réussit à imposer aux Nations Unis « le principe d’une seule Chine ».

Ce fut le début de l’isolement de Taiwan, désormais exclue des Nations Unis et de ses agences. La République populaire de Chine (RPC) refuse depuis d’entretenir des relations diplomatiques avec tout pays reconnaissant Taiwan. Aujourd’hui, son poids économique et démographique est tel que rares sont les pays qui osent la défier et entretenir une relation officielle avec Taiwan, y compris les pays européens. Seuls douze pays dans le monde reconnaissent Taiwan. Hormis le Paraguay et le Vatican, le reste sont de petits pays sans importance, des îles pour la plupart. En Afrique, seul le royaume d’Eswatini (ex-Swaziland) entretient des relations officielles avec Taiwan.

Mais cela n’empêche pas les relations économiques. Taiwan dispose d’une industrie de pointe, c’est un l’un des premiers producteurs mondiaux de semi-conducteurs, ces composants utilisés dans les smartphones, les ordinateurs et autres équipements électroniques. Taiwan domine également la production des micro-processeurs avec son géant TMSC qui assure 60% de la production mondiale. Membre à part entière de l’OMC-l’Organisation Mondiale du Commerce, Taiwan est le premier investisseur étatique en Chine continentale, et un client de premier plan de l’armement américain. Elle dispose d’une importante flotte de F-16,  et est en discussion pour des F-35, ces appareils de toute dernière génération. Aux Etats-Unis, la protection de Taïwan contre une éventuelle invasion chinoise fait l’objet d’un consensus entre démocrates et républicains.

Pourtant la Chine ne renonce pas à récupérer l’île, elle maintient la pression par des exercices militaires qui chaque année se rapprochent un peu plus des côtes de Taiwan. Mais dans la zone est présente en permanence la VII ème flotte américaine, qui a visiblement ordre d’intervenir.  L’île ne se laisse pas non plus intimider, faisant décoller des chasseurs pour intercepter des avions chinois qui pénètrent son espace aérien, exécutant aussi des exercices militaires.  Au regard du droit international, Taiwan jouit d’une indépendance de facto, parce que celle-ci n’a jamais été proclamée. La Chine met régulièrement en garde l’île contre une proclamation unilatérale de son indépendance.

Le changement d’administration à la maison blanche semble avoir bouleversé la donne. Donald Trump suscite de l’inquiétude à Taiwan. Tout d’abord il a menacé de taxer à 100% les produits de l’île, notamment les micro-processeurs si le pays ‘’n’ouvre’’ pas davantage son marché aux produits américains.  Ensuite comme à l’égard des Européens, dans une démarche purement comptable, il estime que l’Amérique a  » beaucoup trop dépensé  »  pour la défense de Taiwan, exigeant désormais que le pays paie pour sa propre défense parce que  » les Etats-Unis ne sont pas une compagnie d’assurances « .

Alors qu’un journaliste lui demandait si les Etats Unis défendraient Taiwan en cas d’invasion de la Chine, Donald Trump contrairement à son prédécesseur Joe Biden qui avait répondu sans hésitation, a esquivé la question, vantant ses « bonnes relations » avec Xi Jinping le numéro 1 chinois, et prédisant que les Chinois  »feront beaucoup d’investissements » aux Etats-Unis sous son mandat. Cette prise de position ambiguë semble avoir ragaillardi les Chinois qui ont récemment déclaré que le ‘’nœud coulant ’’ autour de Taiwan, en référence aux manœuvres militaires autour de l’île, allait se poursuivre jusqu’à  » l’élimination de toutes les forces séparatistes  » et la  » réunification du pays’’.

Les taiwanais sont inquiets. L’attention de Donald Trump semble  focalisée uniquement sur les deals, les contrats, les marchés….etc…..Il ne perçoit pas la dimension géopolitique des questions, ou plutôt refuse de la prendre en compte. S’il a certes affiché une position dure vis-à-vis de la Chine lors de son premier mandat, aujourd’hui que ce soit en Europe ou en Asie, Donald Trump ne rassure pas les alliés de l’Amérique. La Chine va-t-elle suivre l’exemple de la Russie en Ukraine et envahir Taiwan en 2025 ? La venue de Donald Trump à la maison blanche rend cette perspective de plus en plus plausible.

Douglas Mountain – Le Cercle des Réflexions Libérales

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