Union Africaine : les enjeux du sommet de Kigali-Décryptage par Julien Kouao

kouaoLe sommet de Kigali (du 10 au 18 juillet 2016) s’articulera autour de trois enjeux. D’abord,  la question des droits de l’homme, particulièrement les droits de la femme. Généralement, sur le continent, les droits de l’homme sont abondamment proclamés dans les législations nationales et régionales, mais paradoxalement, dans la pratique, ils demeurent insuffisamment protégés, parce que constamment violés.

Ensuite,  le  27e sommet  donnera un coup d’accélérateur à l’intégration africaine avec le lancement du passeport africain. C’est une bonne chose. Cependant,   il faut aller vite car, si l’Afrique  veut rivaliser avec  aux  Etats- continents émergents comme la chine, l’Inde, la Russie et les  blocs économiques et politiques occidentaux, c’est-à-dire, les Etats-Unis et l’Union européenne, il lui faut, dès maintenant ou dans le moyen terme,  faire de la libre circulation des personnes et des biens, l’uniformisation des politiques économiques et fiscales, une réalité.

kigalyEnfin, dernier enjeu, c’est la coopération entre  l’Afrique et la Cour pénale internationale.  La question est symptomatique du fossé qui sépare l’élite politique (hostile à la CPI qu’elle juge  partiale en défaveur des dirigeants africains)  et la société civile africaine (favorable à la juridiction internationale). A l’analyse, les élites politiques africaines veulent une immunité pénale internationale en sus de celles, de droit et de fait,  dont elles bénéficient dans leurs pays respectifs. La société  civile, elle, voit la CPI comme un instrument de protection contre la brutalité politique des dirigeants africains trop souvent non justiciables dans leur propre Etat.

kagameUne autre particularité du sommet de Kigali, la désignation du nouveau président de la commission  de l’Union Africaine. A l’observation , nous avons deux fonctionnaires du système des nations unies,  le Sénégalais Abdoulaye Bathily, représentant spécial du secrétaire général de l’Onu en Afrique centrale et chef du Bureau régional des Nations unies pour l’Afrique centrale, l’ougandaise Speciosa Wandira Kazibwe, l’actuelle envoyée spéciale de l’Onu pour la lutte contre le Sida  et deux chefs de la diplomatie Africaine Pelonomi Venson-Moitoi, ministre des Affaires étrangères du Botswana ou encore , Agapito Mba Mokuy, ministre équato-guinéen des Affaires étrangères.

Et,  du strict point de vue géopolitique, nous avons une ougandaise (Afrique de l’est), un sénégalais (Afrique de l’ouest), un botswanais (Afrique australe) et un équato-guinéen (Afrique centrale). En sus, il ne faut pas négliger la dimension linguistique. Nous avons un francophone, deux anglophones et un hispanique.  Toutes ces variables politiques  vont peser énormément dans le choix du nouveau patron de l’UA.
union-africainekouaoMême si, on le sait, la diplomatie n’est pas une science exacte. Il faut noter que,  l’Afrique de l’Est n’a jamais présidé la commission de l’union depuis la réforme de 2002. En en effet, MM Essy Amara , Alpha Omar Konaré ,  Jean Ping, Madame Zuma sont respectivement de l’Afrique de occidentale, centrale et Australe, ce qui , à l’analyse, peut favoriser l’ougandaise Specioza Wandira Kazibwe. Mais la forte personnalité du sénégalais Aboulaye Bathily peut faire la différence.

Geoffroy-Julien Kouao

Juriste et Analyste Politique

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