La justice ivoirienne va tenter de démêler les fils du conflit opposant depuis 2020 plusieurs proches du pouvoir pour le contrôle de la société minière de bauxite Lagune Exploitation Bongouanou (LEB), dont l’État détient 10 %. Les différentes parties prenantes à cette affaire sont entendues depuis le 21 décembre au tribunal de commerce d’Abidjan.
Lancé par Moumouni Bictogo, le projet minier est fragilisé par les dissensions entre des actionnaires proches du parti présidentiel. Le dossier est devant la justice ivoirienne depuis le 21 décembre après une plainte de l’homme d’affaires Léo Guigui.
Le projet minier avait été lancé en 2018 avec le soutien de l’ex-président Henri Konan Bédié et de l’ancien vice-président Daniel Kablan Duncan. Le gisement dispose de réserves estimées de 34 millions de tonnes de bauxite.
La mine devait produire 750 000 T de minerai par an pour un investissement initial de 24 milliards de FCFA (36,6 millions d’euros), couvrant les différentes phases de développement.
Une usine de transformation en poudre d’alumine était même prévue à l’horizon 2023, pour un financement de 110 milliards de FCFA. Mais le conflit entre les actionnaires a plombé le projet, qui devait créer 1 000 emplois dans la région de Bongouanou, fief de l’opposant Pascal Affi N’Guessan, ancien premier ministre de Laurent Gbagbo (2000-2011) et actuel président du Front populaire ivoirien (FPI).
Fondateur de l’entreprise, Moumouni Bictogo – frère aîné d’Adama Bictogo, président de l’Assemblée nationale et cacique du Rassemblement des houphouëtistes pour la démocratie et la paix (RHDP) – est en conflit ouvert avec plusieurs actionnaires de Lizetta Holding, la structure qui détient la majorité du capital de LEB.
Il s’agit d’Aboubakar Ouattara, créateur du cabinet Goodwill Audit & Consulting, de Mamadou Bamba, directeur général d’Orange Côte d’Ivoire, de Yacine Idriss Diallo, fondateur de la Société ivoirienne d’investissement (SII) et président de la Fédération ivoirienne de football (FIF), ainsi que de l’homme d’affaires Ahmadou Touré, neveu du chef de l’État, Alassane Ouattara, et frère aîné de Masséré Touré-Koné, secrétaire générale adjointe de la présidence. Tous sont entrés au capital de Lizetta en 2020.
Ces derniers, qui ont tenté de prendre le contrôle de la société, reprochent à Moumouni Bictogo une gestion approximative du projet minier de bauxite de Bongouanou, situé à près de 200 km au nord d’Abidjan.
Utilisant leurs relations auprès des banques, ils ont gelé les comptes de LEB et déménagé dans le quartier des Deux-Plateaux les locaux de la société, actuellement présidée par Salif Bictogo, un autre frère de Moumouni Bictogo.
Dans le fief du patron du FPI
Les tensions entre actionnaires étaient arrivées aux oreilles d’Alassane Ouattara par Moumouni Bictogo dès juillet 2021. Il avait mandaté Abdourahmane Cissé, le secrétaire général de la présidence de l’époque, pour mener une médiation.
À la suite de son intervention, Yigo Thiam, ancien bras droit du tycoon Yérim Sow, disposant de bonnes relations avec tous les actionnaires, avait été nommé DG de Lizetta Holding, tandis que Moumouni Bictogo conservait la présidence de la société.
Sur ses instructions, le permis minier de Bongouanou, initialement détenu par Lagune Exploration Afrique (LEA), une autre société fondée par Moumouni Bictogo, avait été transféré à LEB. Ce transfert avait suscité l’ire de l’homme d’affaires ivoirien Léo Guigui, un actionnaire de LEA. C’est lui qui a porté l’affaire en justice.
Par Africa Intelligence
Ledebativoirien.net
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